dimanche 23 février 2014

COMMENT... MATHS (3)

25e séance avec débat






COMMENT J’AI DETESTE LES MATHS
Documentaire français de Olivier Peyon. (2013 - 1h43)






A travers un voyage aux quatre coins du monde avec les plus grands mathématiciens dont Cédric Villani, Jean-Pierre Bourguignon ou Robert Bryant, ce film nous raconte comment les mathématiques ont bouleversé notre monde, pour le meilleur… et parfois pour le pire.
Olivier Peyon relève un bien beau défi en s'attaquant ainsi, dans un film passionnant, parfois très drôle et tellement riche, à la discipline reine des sciences modernes. Non seulement c’est palpitant mais aussi amusant. Vous avez détesté les maths ? Vous allez adorer ce film !
A PARTIR DU JEUDI 20 FEVRIER (première séance scolaire le matin)
+ CINÉ-DÉBAT VENDREDI 21 FEVRIER à 20h30





Les maths impressionnent toujours le public globalement adulte de cette soirée, si on en croit le silence profond qui a suivi le générique. Mais bientôt les expériences personnelles sont remontées à la surface, et chacun n’a pas manqué de faire revivre la période de sa vie où les maths étaient les plus importantes. Beaucoup ont vécu l’époque des maths dites « modernes ». Avec plus ou moins de bonheur, mais en tout cas en confrontant ce qui fut vécu en tant qu’élève avec les explications sociologico-politiques proposées par le film.
Les enjeux de cette réforme mémorable des années70 sont en rapport avec le baby-boom : sélectionner très vite une élite,  quitte à prendre le risque de sacrifier le plus grand nombre. S’appuyer sur une matière plus démocratique que les autres, car relevant d’un bon sens qui serait la chose du monde la mieux partagée, la moins dépendante a priori du contexte socio-culturel. Ce n’est peut-être là qu’une première illusion. La seconde, ce serait de penser qu’elle donne lieu à une évaluation plus « objective ». Peut-être a-t-on fait jouer le rôle de sélection à cette discipline, simplement par une tendance habituelle à se porter vers des épreuves qui paraissent plus faciles à quantifier. Ce sera, pour elle, et peut-être aussi pour l’ensemble du système éducatif, à la fois une chance et une malédiction.

Quelques très jeunes enfants étaient également présents et, avec l’aide de leurs parents, ont tenté de profiter au mieux de la fréquentation des grands esprits qui sont aussi des hommes (parfois des femmes) qui occupaient l’écran.

On a essayé de trouver dans les propos du film des motifs d’espoir et d’amélioration. On  a rappelé les progrès sur les connaissances de la petite enfance dans le domaine du raisonnement logique permis par les travaux de Jean Piaget. Mais au final, on en revenait à l’étonnement de Cédric Villani : depuis le temps qu’on réfléchit à la meilleure méthode pour enseigner les maths, on ne s’est encore pas mis d’accord, et tout fait régulièrement débat. Pour la lecture aussi, d’ailleurs.

Comme on pouvait s’y attendre, le rôle du professeur fut mis en avant, et parfois sur la sellette. Plus qu’en littérature, où le support (romanesque ou théâtrale) a une réelle consistance, les contenus mathématiques apparaissent bien trop abstraits pour qu’on ne cherche pas à les incarner dans la personne qui vous les enseigne. D’où l’importance de l’enseignant (perçue positivement ou négativement), dont on oublie généralement que l’action est cependant limitée ou encadrée par les programmes et les directives imposés par l’institution.

On est tenté déduire de tout ce qu’on a vu que tout sert. Même si le chemin rapide est souvent le plus beau (la métaphore de François Sauvageot, la montagne dont on a atteint le sommet par une voie tortueuse et aride, alors qu’on a ignoré un accès beaucoup plus court et commode), Villani réhabilite paradoxalement le chemin tortueux, qui permet souvent de belles rencontres (Montaigne n’est pas loin, avec son goût des parcours digressifs). Quitte d’ailleurs à trouver le contraire de ce qu’on avait prévu. C’est le voyageur mathématique qui choisit de se perdre plutôt que d’aller directement au but fixé en suivant tout simplement son habituel GPS (encore que, dans la vraie circulation, le GPS…). En tout cas je retiens les propos de François Sauvageot, sur l’importance de bien concevoir, bien sûr, mais surtout ensuite de trouver les bons mots pour transmettre et communiquer. Un pédagogue !

Oui, on est tenté à ce stade de conclure que tout sert. A une réserve près, que nous présente encore Cédric Villani : il faut choisir son problème avec beaucoup de soin et de discernement, car il en est beaucoup qui sont sans intérêt. On le croit sur parole…

Autre sujet de débat : les mathématiques ont été livrées en bouc émissaires de la crise des subprimes, et - cerise sur le gâteau médiatique - les formules honnies ont souvent été le fait de mathématiciens français !  En fait, il convient de distinguer plusieurs niveaux. Les mathématiques ne sont pas immorales en soi, seul l’usage qu’en font les humains peut l’être. Si la France est un pays de premier plan en mathématiques (pour combien de temps encore ?…), rien de plus normal que de trouver plusieurs mathématiciens aux manettes. Enfin, l’essentiel est bien que les mathématiciens ne peuvent espérer maîtriser un peu l’aléatoire bancaire que s’ils disposent de données d’ensemble fiables et étendues. Or, les banques garent jalousement leurs informations en internes, et ne communiquent jamais vers l’extérieur de façon exploitable ou digne de confiance.   

Je ne voudrais pas, au moment de livrer le paragraphe suivant, qu’il y ait la moindre ambiguïté sur le mérite principal du documentaire qui est au moins d’exister. Ce n’est pas si fréquent que cette discipline réputée modèle des sciences dures soit portée à l’écran, avec ceux qui la créent et la font progresser.
En outre il nous a permis de vivre trois belles séances fructueuses, et loin de nous l’intention de faire preuve d’ingratitude.
Mais nous ne serions pas non plus ce que nous sommes, si nous ne rendions pas compte d’opinions qui nous paraissent également dignes d’intérêt, qui d’ailleurs ne remettent pas en cause ce qui vient d’être dit, mais qui tendent à explorer les marges, les frontières, où on pourrait facilement basculer dans autre chose, tout en approfondissant la réflexion entamée. D’une certaine façon, nous ne faisons rien d’autres ainsi que suivre une des leçons importantes du film.

Car le sentiment existe parfois, surtout chez les « vrais passionnés » de tous âges, que le film ne serait pas en totale sympathie avec les mathématiciens, et qu’il laisserait la place libre à des clichés proches de la dérision. Pour eux, le titre ne serait pas autant qu’on veut bien le proclamer une claire antiphrase. « Il les montre comme si ils étaient dans un asile de fous ! » (Un enfant de 12 ans, faisant sans doute allusion aux scènes de tables où les convives s’ignorent dans des attitudes figées qui évoquent irrésistiblement l’autisme). « A aucun moment il ne nous nous donne à voir le vrai travail mathématique, j’ai mieux aimé le documentaire sur Andrew Wiles et le théorème de Fermat qu’on nous a montré à l’école. » (Un élève de première S, dans la séance de l’après-midi). « Comme dans la parabole du sage et de la lune, le réalisateur filme le doigt quand le savant montre la lune. » (Une professeure de mathématique de lycée).

Je crois pouvoir apporter quelques éléments concrets pour étayer ce dernier point de vue. Le plan de la nouvelle médaille Fields faisant un discours important devait-il aboutir à un pied qui s’agite ? L’insistance sur les pieds nus ou sans chaussure est une figure lourdement récurrente du film, vite réductrice. Est-ce la nouvelle synecdoque du mathématicien ? Le pied est rarement associé à l’intelligence, s’il est vrai qu’il l’est souvent au plaisir…  Les lieux prestigieux comme l’IAS (Institute for Advanced Studies)  ne pouvaient-ils offrir rien d’autre, après un glissement négligeant sur le buste d’Einstein, qu’une très banale machine à café ? Et que dire de l’admirateur de la statue ? L’insistance du plan, qui habituellement favorise l’émotion (un drame, et la personne interviewée « craque », et son émotion vient submerger le plan…), se prolonge ici sans qu’aucun argument sérieux ne vienne justifier ce qui peut apparaître pour une lubie. Je ne conteste par que, pour certains, l’émotion puisse se transmettre, mais je suis persuadé que, pour beaucoup, c’en est presque pathétique…
Poussons encore davantage le mauvais esprit, en espérant que, ce faisant, on ne s’éloigne pas trop du légitime esprit critique. Dans cette configuration, on verrait un réalisateur en train – consciemment ou non – de « se venger » des mathématiques et des mathématiciens en abusant du pouvoir que lui donnent présentement la caméra qu’il commande et le montage qu’il maîtrise. Remarquez qu’on a souvent la même déception avec la création littéraire, vue de l’extérieur. On y voit l’écrivain en voyage, on sait avec qui il couche ou ne couche pas, avec qui il se querelle, mais ce qu’il écrit semble tenir de la pure magie quand tout à coup on le voit agiter sa plume d’oie et pondre un chef d’œuvre immortel. Ce n’est certainement pas seulement avec de simples trucs comme un chapeau avec une carte à jouer ou une ceinture retirée de son pantalon que François Sauvageot gagne l’estime de ses élèves. Ces grands talents deviennent alors des sortes de pantins, de « doux-dingues », en tout cas de caricatures, visant à donner corps aux pires clichés des bandes dessinées. Vous pensez tout de suite au célèbre professeur Cuthbert Calculus (pour les anglophones), Tryphon Tournesol (pour les francophones), professeur sympathique… dans les aventures de Tintin.



Dan le journal de mon enfance (qui ne remonte quand même pas à 1901), c'étaient les aventures du professeur Nimbus (que j'attendais avec impatience) qui jouait ce rôle un peu ridicule.

Le professeur Nimbus est le personnage d'un comic strip français « muet » en quatre images. Il a été créé et dessiné parAndré Daix (de son vrai nom André Delachanal) (21 janvier 1901 - 27 décembre 1976). Avec plus de 11.000 aventures sur près de 60 ans, le Professeur Nimbus fut la série la plus publiée dans nos quotidiens, et la plus populaire.

C'est un homme chauve avec un seul cheveu en forme de point d'interrogation et des lunettes rondes. Ses aventures sont de courtes "blagues" d'un comique simple. - Aujourd'hui un professeur Nimbus désigne un scientifique farfelu ou inconscient.

Je suis sûr que je ne suis pas seul dans ce cas. D'ailleurs, la dernière planche que j'ai trouvée sur Internet était accompagnée de ce témoignage d’un lecteur de La Dépêche de Constantine :
« Mon principal souvenir de "La Dépêche" reste les aventures du professeur Nimbus ! »




Bon d’accord, je me suis peut-être laissé emporter trop loin. Il est même possible que je décide de retirer, dans un avenir plus ou moins proche, ce dernier développement. En tout cas il est une constance à laquelle je me raccrocherai mordicus, c’est la  recommandation qui suit.
Il faut lire le livre de Cédric Villani en complément, c’est un excellent moyen de s’instruire tout en se faisant plaisir. Un idéal pédagogique est, au moins dans ce cas concret, parfaitement atteint. Pour la solution miracle qui résout tous les problèmes, on sait bien qu’il faudra atteindre encore un peu.



Peut-être enfin souhaitez-vous voir de près une des vedettes non humaines du film? Non, pas la machine à café, ni la statue, ni les serviettes de table. La médaille Fields.

La médaille Fields est la plus prestigieuse récompense pour la reconnaissance de travaux en mathématiques, souvent comparée au prix Nobel.
Elle est attribuée tous les quatre ans au cours du congrès international des mathématiciens à, au plus, quatre mathématiciens devant avoir moins de 40 ans au 1er janvier de l'année en cours. Les lauréats se voient attribuer chacun une médaille et un prix de 15 000 dollars canadiens (soit un peu plus de 10 000 euros).

John Charles Fields (1863-1932) proposa la création de cette médaille en 1923 lors d'une réunion internationale à Toronto. À sa mort, en 1932, il lègue ses biens à la science afin de financer la médaille. À l'origine, seules deux médailles étaient décernées tous les quatre ans. La Seconde Guerre mondiale a interrompu l'attribution de cette distinction jusqu'en 1950. La décision de passer à quatre lauréats au plus date de 1966.




Sur l'avers, un portrait de profil d'Archimède et une citation en latin du poète Manilius, Astronomica, IV, v. 392 :« Transire suum pectus mundoque potiri » (mot à mot : « traverser ton propre cœur (= franchir tes limites) et te rendre maître de l'univers (par la connaissance »).



Sur le revers, l'inscription latine :
CONGREGATI
EX TOTO ORBE
MATHEMATICI
OB SCRIPTA INSIGNIA
TRIBUERE
Traduction : « Les mathématiciens s'étant rassemblés du monde entier ont remis cette récompense en raison de remarquables écrits. »
Dans l'arrière-plan, une représentation de la tombe d'Archimède, avec la gravure de son théorème « De la sphère et du cylindre » (une sphère et un cylindre circonscrit de mêmes hauteur et diamètre, travail duquel il était le plus fier) derrière un rameau.

La tranche porte le nom du lauréat.



DES VIERZONNAIS SUR LA ROUTE D' HYDERABAD AU BON MOMENT

Heureusement qu'Yveline et John ont immédiatement saisi l'intérêt du témoignage qu'ils ont reçu lors du pot d'après débat de la part de Laurence, notre responsable communication, et de son mari.
Dès qu'ils m'ont mis sur la piste, je n'ai pas tardé à  solliciter les intéressés par un mail pressant, et je suis bien sûr que nombreux sont ceux qui se rallient à mon point de vue,  qui les remercient chaleureusement pour leur contribution, dont le moins qu'on puisse dire est qu'elle sort de l'ordinaire. Vous avez ci-dessous toutes les pièces utiles pour juger par vous-même...



Quoi! qu'est-ce que j'apprends? Vous auriez été tous les deux témoins des lieux de hautes mathématiques dont il est question dans le film, et vous n'en avez rien dit!
Il n'est qu'une façon de vous faire pardonner cet impair, c'est de me faire parvenir en retour un petit témoignage pour mettre sur le blog, et s'il pouvait y avoir une ou deux photos avec, il vous sera beaucoup pardonné!
Allez, cordialement quoi qu'il arrive.


Rien à dire de particulier. En Août 2010 lors d'un voyage en Inde du Sud avec mon mari, nous nous sommes retrouvés à partager un "masala dosa" (plat indien plein de saveurs) à Munnar dans le Kérala avec deux personnes d'origine Israélienne père et fils, l'un mathématicien à priori très connu mais pas par nous....et son fils chercheur qui se rendaient au congrès international de mathématiques à Hyderabad.
Je n'apprécie pas spécialement cette matière contrairement à mon mari, mais ce monsieur était très pertinent et passionné et nous a parlé de cette rencontre qui a lieu tous les 4 ans, et comme nous étions Français, nous avons échangé sur Evariste Galois car il avait lui même travaillé sur ses recherches.
Evariste Galois a été provoqué en duel et la nuit d'avant sa mort il l'a passée à noter beaucoup de résultats sur ses recherches sans noter les démonstrations qui ont été démontrées plusieurs années après.
Le film de ciné-rencontres "Comment j'ai détesté les maths" nous a rappelé cette rencontre insolite, mais je n'ai pas de nom (oublié dans le feu de la discussion) et pas de photo car sur le moment ce n'était pas de circonstance.
Je ne suis pas certaine que cela aurait été d'un grand intérêt pour le public présent (sic!), c'est pour cela que nous n'avons rien dit.


Pas d’accord ! Je suis toujours épaté de voir qu’à Vierzon il y a des gens dont les rapports avec des lieux et des événements lointains présentés dans nos films sont si étroits. En l’occurrence, je trouve que votre expérience sort vraiment de l’ordinaire. Il est vrai que je suis plutôt du genre casanier et que je voyage peu. Ce qui est sûr, c’est que je vous remercie beaucoup de ce témoignage et de cette contribution qui va même jusqu’à m’émouvoir, car Evariste Galois m’a toujours passionné, pour des raisons qui ne sont pas exclusivement mathématiques, vous vous en doutez.
Donc je persiste et signe: avec toute ma gratitude !





QUELQUES NOTES DE LECTURE



7- Extraordinaire disponibilité d'un chercheur en pleine créativité.
"Lecteurs et lectrices sont les bienvenus pour me faire part de leurs questions ou commentaires par voie électronique."

19- Métaphore arthurienne.Ceux qui ont vu le film feront plutôt le rapprochement avec la métaphore fromagère.
"Le mathématicien, comme la pauvre Dame de Shalott des légendes arthuriennes, ne peut regarder le monde directement, mais seulement à travers son reflet, mathématique en l'occurrence."

22- Rassurant : le mathématicien génial ne maîtrise pas tout, et peut se tromper sur le genre d'un nom (oxymore est masculin). Ne comptez pas sur moi, en revanche, pour repérer d'éventuelles erreurs dans les équations...
"L'astrophysicien Lynden-Bell [...] baptisa ce phénomène relaxation violente. La belle oxymore!"

25- Lecteur de mangas. 
"Mangas et mathématiques ne se mélangent pas. Peut-être plus tard, dans les rêves?"

28- "...la distinction artificielle entre mathématique pure et mathématique appliquée."

35- J'apporte immédiatement une contradiction à ces jugements respectivement appliqués à Charles Fourrier "socialiste" et à Victor Hugo au "lourd passé de girouette politique." Le premier ne mérite à mon sens pas cet excès d'honneur, ni le second cette indignité. Sa trajectoire politique est au contraire remarquablement caractérisée par une droite dont l'équation présente un coefficient directeur strictement positif.

177- Rencontre avec "mon héros mathémathique", John Nash qui aurait bien mérité "une, deux, trois madailles Fields".

178- Nash est l'un des rares scientifiques vivants à avoir été le héros d'un film hollywoodien. Je n'ai pas aimé le film outre mesure, mais j'ai beaucoup apprécié la biographie dont il était issu, John Nash, a Beautiful Mind."

179- Portrait de Nash en 1956, à 28 ans. "Sa fière allure n'a pas grand chose à envier à celle de Russell Crowe, qui jouera son rôle à Hollywood un demi-siècle plus tard."

Comme ce blog est fait d'échos et de retouches successivement rapportés, je reviens à cette remarque juste après les films A ciel ouvert (l'autisme) et juste avant le dernier Russell Crowe (Noé) de mars-avril 2014. C'est exactement à cette période (film De toutes nos forces) que John attire mon attention sur A serious man. Je le mentionne également. 






Un homme d'exception (A Beautiful Mind), film de Ron Howard (2001) adapté de la biographie Un Cerveau d'exception de John Forbes Nash Jr., écrite par Sylvia Nasar, ancienne journaliste économique pour le New York Times, et parue en 1999.

En 1947John Forbes Nash Jr. est un brillant élève, qui élabore sa théorie économique des jeux à l'Université de Princeton. Au début des années 1950, suite à ses travaux et son enseignement au Massachusetts Institute of Technology, William Parcher, agent fédéral américain, se présente à lui pour lui proposer d'aider secrètement les États-Unis. La mission de John consiste à décrypter dans la presse les messages secrets d'espions russes, censés préparer un attentat nucléaire sur le territoire américain.

Cette description éloquente des événements les plus tragiques de la vie de John Nash souffre de quelques inexactitudes et oublis, parmi lesquels la réinvention du jeu Hex, joué sur le carrelage hexagonal des salles de bains de Princeton (les scènes se référant à la réinvention de Hex ont été tournées, mais furent coupées au montage afin de maintenir un certain rythme scénaristique).
La version française comporte également quelques erreurs de traduction, probablement dues à l'absence de mathématiciens parmi les traducteurs. Ainsi, « … are covering spaces » est par exemple traduit par « … recouvrent les espaces » au lieu de « … sont des revêtements ».
Le documentaire sur PBS A Brilliant Madness tente d'être plus précis. Des personnages imaginaires (un agent des services secrets, un ami rencontré à l'université et la nièce de 11 ans de cet ami) ont été inventés pour le cinéma, afin d'illustrer les délires schizophrènes du personnage.


Public Broadcasting Service (PBS)
A Brilliant Madness est l'histoire d'un génie mathématique dont la carrière a été écourtée par une descente dans la folie. À l'âge de 30 ans, John Nash, mathématicien incroyablement original et excentrique célèbre MIT, a soudainement commencé à réclamer que les étrangers étaient en communication avec lui et qu'il était un messager spécial. Un diagnostic de schizophrénie paranoïde, Nash a passé les trois prochaines décennies et des hôpitaux psychiatriques, mais tout oublié. Pendant ce temps, une preuve qu'il avait écrit à l'âge de 20 est devenu une fondation de la théorie économique moderne. En 1994, Nash a commencé à montrer des signes de sortir de son délire, il a reçu le prix Nobel d'économie. Le programme comprend des entrevues avec John Nash, sa femme Alicia, ses amis et ses collègues et des experts dans la théorie des jeux et la maladie mentale.







A serious man, (ou Un homme sérieux au Québec), film américano-britannico-français réalisé par Joel et Ethan Coen (2009). 

1967. Larry Gopnik, professeur de physique dans une petite université du Midwest, vient d'apprendre que sa femme Judith allait le quitter. Elle est tombée amoureuse d'une de ses connaissances, le pontifiant Sy Ableman. Arthur, le frère de Larry, est incapable de travailler et dort sur le canapé. Danny, son fils, a des problèmes de discipline à l'école hébraïque, et sa fille Sarah vole dans son portefeuille car elle a l'intention de se faire refaire le nez. Pendant ce temps, Larry reçoit à la fac des lettres anonymes visant à empêcher sa titularisation, et un étudiant veut le soudoyer pour obtenir son diplôme. Luttant désespérément pour trouver un équilibre, Larry cherche conseil auprès de trois rabbins. Qui l'aidera à faire face à ses malheurs et à devenir un mensch, un homme bien ?




De fil en aiguille on en vient à évoquer un film sans doute de moindre importance, mais qui a le mérite de présenter une mathématicienne, ce qui n'est pas si courant, et ce qui permet de revoir le séduisant visage de Jill Clayburgh. 


It’s my turn, de Claudia Weil, avec Jill Clayburgh et Michael Douglas (1980).

Kate Gunzinger est professeure à l’Université de Chicago. Sa relation avec Homer n’est pas franchement passionnée. Aux noces de son père veuf, elle rencontre le fils de la mariée, Ben Lewin, ancien joueur de baseball professionnel. Bien que marié, il entame une relation avec Kate. Quand ils se séparent, elle se sépare aussi d’Homer sans savoir ce que sera son avenir. La première scène montre Kate Gunzinger en plein cours où elle donne une preuve correcte du "lemme du serpent" (snake lemma) en algèbre homologique.











 DOCU FRERE : AT BERKELEY


Dans un état d’esprit différent, mais dans une inspiration analogue (pour parler comme De Gaulle), on ne manquera pas de remarquer ce documentaire américain très long, dont l’université de Berkeley est la vedette.



26 février 2014 (4h04min, à partir de 250 heures de rushes) 



Un semestre sur le campus de la plus prestigieuse université publique américaine : Berkeley.
Frederick Wiseman nous montre les principaux aspects de la vie universitaire et plus particulièrement les efforts de l’administration pour maintenir l’excellence académique et la diversité du corps étudiant face aux restrictions budgétaires drastiques imposées par l’État de Californie.
A travers les différentes facettes de cette institution mythique, At Berkeley nous donne accès au débat sur l'avenir de l'enseignement supérieur aux États-Unis.

Désengagement de l’Etat, crise financière, hausse des frais de scolarité… Quand Frederick Wiseman a foulé les couloirs de l’université de Californie à Berkeley, le contexte politico-économique n’était pas des meilleurs. Comme toujours dans sa démarche de documentariste engagé, le réalisateur a voulu donner un coup de projecteur sur ce lieu de vie célèbre pour sa liberté d’expression (le Free Speech Movement, l’opposition à la guerre du Vietnam, le mouvement hippy) et son excellence en matière d’enseignement (29 prix Nobel ont été décernés à des chercheurs issus de cette université).


Maths électriques

Une contribution du Canard enchaîné (5 février 2014) au calcul de ce que vous pourriez gagner en produisant du courant électrique pour le revendre à EDF:



La finance dépend des mathématiques... ou l'inverse !








On en redemande !

(Berry républicain 2 janvier 2014)


Ajouté le 15 novembre 2014 en raison de l'actualité.


Alexandre Grothendieck, le plus grand mathématicien du XXe siècle, est mort

Le Monde.fr | 14.11.2014
Par Stéphane Foucart et Philippe Pajot





Considéré comme le plus grand mathématicien du XXe siècle, Alexandre Grothendieck est mort, jeudi 13 novembre, à l'hôpital de Saint-Girons (Ariège), non loin de Lasserre, le village où il s'était secrètement retiré au début des années 1990, coupant tout contact avec le monde. Il était âgé de 86 ans. Apatride naturalisé français en 1971, également connu pour la radicalité de son engagement pacifiste et écologiste, ce mathématicien singulier et mythique laisse une œuvre scientifique considérable.
Il naît le 28 mars 1928 à Berlin, dans une famille atypique. Sascha Schapiro, son père, est russe de confession juive, photographe et militant anarchiste. Egalement très engagée, Hanka Grothendieck, sa mère, est journaliste. En 1933, Sascha quitte Berlin pour Paris, où il est bientôt rejoint par Hanka. Entre 1934 et 1939, le couple part pour Espagne où il s'engage auprès du Front populaire, tandis que le petit Alexandre est laissé en Allemagne, à un ami de la famille.

SON PÈRE MEURT À AUSCHWITZ

A la fin de la guerre civile espagnole, au printemps 1939, Alexandre retrouve sesparents dans le sud de la France. Dès octobre 1940, son père est interné au camp du Vernet. Il en part en 1942 pour être transféré à Auschwitz, où il sera assassiné. Alexandre et sa mère, eux, sont internés ailleurs. « La première année de lycée en France, en 1940, j'étais interné avec ma mère au camp de concentration, à Rieucros près de Mende », raconte-t-il dans Récoltes et Semailles, un texte autobiographique monumental jamais publié, tiré à 200 exemplaires, mais qui circule désormais sur Internet.

« C'était la guerre, et on était des étrangers – des “indésirables”, comme on disait. Mais l'administration du camp fermait un œil pour les gosses, tout indésirables qu'il soient. On entrait et sortait un peu comme on voulait. J'étais le plus âgé, et le seul à aller au lycée, à 4 ou 5 kilomètres de là, qu'il neige ou qu'il vente, avec des chaussures de fortune qui toujours prenaient l'eau. »

14 PROBLÈMES MATHÉMATIQUES RÉSOLUS EN QUELQUES MOIS

En 1944, son bac en poche, l'adolescent de 16 ans n'a pas encore été identifié par ses professeurs comme le génie qu'il est. Il s'inscrit en maths à l'université de Montpellier puis, à l'orée de la thèse, est recommandé à Laurent Schwartz et Jean Dieudonné.
L'histoire, célèbre, a contribué à forger son mythe : les deux grands mathématiciens confient au jeune étudiant une liste de quatorze problèmes qu'ils considèrent comme un vaste programme de travail pour les années à venir, et lui demandent d'en choisir un. Quelques mois plus tard, Alexandre Grothendieck revient voir ses maîtres : il a tout résolu.
Dans cette première période de production mathématique, Grothendieck se consacre à l'analyse fonctionnelle, domaine de l'analyse qui étudie les espaces de fonctions. Ses travaux révolutionnent le domaine, mais demeurent moins connus que ceux qu'il conduira dans la deuxième partie de sa carrière.
UN INSTITUT FINANCÉ POUR LUI
Dès 1953, le jeune mathématicien se retrouve confronté à la nécessité d'obtenirun poste dans la recherche et l'enseignement. Apatride, il ne peut accéder à la fonction publique et, rétif au service militaire, il ne veut demander pas la naturalisation française. Il part enseigner au Brésil, à Sao Paulo, et aux Etats-Unis, à Lawrence (Kansas) et à Chicago (Illinois).
Deux ans plus tard, à son retour en France, industriel et mathématicien, Léon Motchane, fasciné par l'intuition et la puissance de travail du jeune homme – il n'a que 27 ans – décide de financer un institut de recherche exceptionnel, conçu sur le modèle de l'Institut d'études avancées de Princeton : l'Institut des hautes études scientifiques (IHES) à Bures-sur-Yvette. Le lieu est imaginé pour servir d'écrin au mathématicien qui va y entamer une deuxième carrière.

UNE NOUVELLE GÉOMÉTRIE

Jusqu'en 1970, entouré d'une multitude de talents internationaux, il dirigera son séminaire de géométrie algébrique, qui sera publié sous la forme de dizaines de milliers de pages. Sa nouvelle vision de la géométrie, inspirée par son obsession de repenser la notion d'espace, a bouleversé la manière même de faire des mathématiques. « Les idées d'Alexandre Grothendieck ont pour ainsi dire pénétré l'inconscient des mathématiciens », dit Pierre Deligne (Institut des études avancées de Princeton), son plus brillant élève, lauréat de la médaille Fields en 1978 et du prix Abel en 2013.

Les notions qu'il a introduites ou développées sont aujourd'hui encore au cœur de la géométrie algébrique et font l'objet d'intenses recherches. « Il était unique dans sa façon de penser, affirme M. Deligne, très ému par le décès de son ancien maître. Il lui fallait comprendre les choses du point de vue le plus général possible et une fois que les choses étaient ainsi comprises et posées, le paysage devenait si clair que les démonstrations semblaient presque triviales. »
IL S'ÉLOIGNE DE LA COMMUNAUTÉ SCIENTIFIQUE
En 1966, la médaille Fields lui est décernée, mais il refuse pour des raisons politiques de se rendre à Moscou pour recevoir son prix. La radicalité avec laquelle il défendra ses convictions ne cessera jamais. Et c'est à partir de la fin des années 1960 qu'il s'éloigne de la communauté scientifique et de ses institutions. En 1970, il fonde avec deux autres mathématiciens – Claude Chevalley et Pierre Samuel – le groupe Survivre et Vivre, pacifiste, écologiste et très marqué par le mouvement hippie. A la même époque, il découvre que l'IHES est partiellement financé, bien que de manière très marginale, par le ministère de la défense. Il quitte l'institut. Alexandre Grothendieck est naturalisé français l'année suivante.

Le Collège de France lui offre alors un poste temporaire, qu'il utilise largement comme tribune politique. Il quitte bientôt le Collège. En 1973, il devient professeur à l'université de Montpellier  – qui, selon une enquête de Libération publiée en juillet 2012, conserve encore des milliers de pages inédites du grand mathématicien. Puis il rejoint le CNRS en 1984, jusqu'à sa retraite, en 1988. Cette année-là, il reçoit le prix Crafoord, doté d'une forte somme d'argent. Il refuse la distinction et s'en explique dans une lettre au Monde et publiée le 4 mai 1988.
Le texte témoigne d'une profonde amertume, d'un divorce avec ses pairs et leprojet même de la recherche scientifique. Pourquoi un tel ressentiment ? « Il n'y a pas de raison unique », explique Pierre Deligne. Le fait que la société ait ignoré ses idées sur l'enjeu écologique n'y est pas étranger. « Sur cette question, il avait l'impression que le fait de prouver la réalité des problèmes ferait bouger les choses, comme en mathématiques », raconte son ancien élève. Ce ne fut pas le cas.
En 1990, il quitte son domicile pour une retraite gardée secrète. A ceux avec qui il garde contact, il demande que ses écrits non publiés soient détruits. Brouillé avec ses proches, sa famille, avec la science et le monde entier, il s'installe dans un petit village pyrénéen. Il y restera, coupé de tous, jusqu'à sa mort.








BON BLOG


Vous aimez les maths sous tous leurs aspects? Alors je crois que vous ne serez pas déçu si vous allez visiter ce blog de Didier Müller :


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Voyez spécialement la rubrique Séries et films, qui présente une émission dédiée à Cédric Villani. Sympathie et intelligence sont constamment au rendez-vous.
Je découvre aussi une vidéo d'hier, l'émission On n'est pas couché. (A voir entre 19' et 43').
J'y ai noté au passage cette "citation célèbre d’une grande mathématicienne russe" :
« Nul ne peut être un grand mathématicien sans avoir l’âme d’un poète. »

















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