dimanche 22 juin 2014

TOUT EST PERMIS

39e séance avec débat
(pénultième séance de la saison 2013-2014)








TOUT EST PERMIS

Documentaire français de Coline Serreau. (2013 - 1h36)




Le permis de conduire à points est instauré depuis plus de 20 ans .
Véritables lieux de mixité sociale et culturelle, les stages de récupération de points sont l’occasion pour les auteurs d'infractions d’y exprimer leur révolte mais aussi de se raconter. Les nombreux témoignages et images recueillis par Coline Serreau lors de ces stages, dressent un portrait tragi-comique de notre société où l’individualisme et les petites habitudes de chacun mettent en péril le bonheur de tous.

CINÉ-DÉBAT VENDREDI 20 JUIN à 20h30






Diable, diable ! dit-il en se grattant la tête,
         Cette salle est bien vide, on se croirait en août…
               Nous allons vers un bide, et c’est vraiment trop bête.
Le ciné est désert, et c’est la faute au foot !









Vous avez facilement des préjugés avec ce genre de film. Un documentaire, soit. On va filmer des gens dans un cadre particulier, à la recherche de points perdus par de multi-récidivistes habitués des infractions au code de la route. Bref, beaucoup de gros plans en perspective, beaucoup de paroles, peu d’évasion. Donc peu de variété, peu d’échappatoire, peu de surprise. Le cadre du cinéma n’apparaît pas alors forcément le plus approprié. La télévision en soirée, dans la programmation d’un service public du genre « Enquête sur… », paraît a priori être le média naturel pour cela.

Eh bien, à l’expérience de cette soirée, on peut probablement conclure que nous aurions eu tort (bien évidemment, le « vous » précédent était tout ce qu’il y a de plus généralisant).
Le cinéma y avait sa part, peut-être même au-delà de ce qu’on pouvait attendre, et j’en dirai deux mots… plus tard.
Pas forcément dans l’angle des plans, malgré quelques caricatures peut-être involontaires dues à l’usage de certaines contre-plongées, accentuant soit le nez, soit les oreilles… D’ailleurs, sur ce terrain-là, on peut dire que le très gros plan de face, le plan frontal le bien nommé, révélant des certitudes à front de taureau, était sans doute le plus efficace. C’est aussi le plus émouvant, quand il se concentre sur le joli visage plein de sérénité et d’optimisme de cette jeune tétraplégique, avant de s’élargir en plan moyen, montrant l’étendue de son handicap et de sa détresse. Mais il reprend bientôt la main, et la détresse se lit maintenant de très près dans les larmes et les traits soudain défaits. L’économie des moyens n’est pas antinomique de la dureté des effets.
Cinéma encore que les réactions spontanées de la salle pourtant peu remplie (on l’a déjà dit, c’était au moment où la France passait un 5-2 inattendu à la Suisse…). On y devinait tour à tour l’approbation, le doute, la réprobation, dans l’humour ou dans l’indignation. Même peu remplie, une salle vous rappelle que le cinéma est une activité collective.
Mais le cinéma se nichait surtout dans l’élaboration du montage. On voyait bien qu’on y avait passé plus de temps que pour un reportage informatif, et qu’un point de vue à la fois précis et complexe s’y révélait tout en tenant ferme les commandes. Disons tout de suite la plus évidente des progressions : c’est l’effet des rigolards de Knock. On arrive doucement dans le décor, détendu, souriant, l’humour a l’air de devoir s’installer comme chez lui. Et puis, insidieusement mais obstinément, ce n’est pas le glissement progressif du plaisir qui se produit, mais celui de la dureté des témoignages, des situations, des tragédies. Le rire se fige.

A partir de là - c’est-à-dire du dispositif, du thème et du traitement -, les références étaient vite sollicitées. Depardon, Cronenberg,.. et Coline Serreau elle-même.

David Cronenberg, Crash (1996)



Bien entendu, c’était aussi l’occasion, tant au cours du débat qu’au moment du pot final, d’une série de confessions personnelles sur les mémorables expériences automobiles des uns et des autres. Le pittoresque n’y manqua pas, mais – et il n’y a aucune raison de soupçonner la bonne foi du public – personne n’y a révélé qu’il (ou elle) avait participé à un tel stage de sensibilisation et de récupération de points.





Respecter les limites

A trop systématiser, on risque de franchir les limites raisonnables de l’adhésion confiante voire de la simple honnêteté intellectuelle. On pense parfois à ces juges de BD qui ricanent quand quelqu’un devant eux clame son innocence : « Tous les coupables disent ça ! » Suivre aveuglément les autorités qui affirment leur infaillibilité relève de l’expérience de Milgram plus que de la démocratie. Ainsi il n’y aurait plus d’erreurs judiciaires depuis Dreyfus ? Ainsi, il n’y aurait aucune responsabilité des pouvoirs publics dans les drames de la route ? Qui peut le croire ? Nous avons tous été témoins d’aberrations diverses tardivement corrigées ou jamais corrigées du tout, aux passages à niveau notamment. Il est vrai que la brochette de cas présentés est tellement caricaturale de mauvaise foi qu’on se demande s’il ne s’agit pas de comédiens payés pour leur capacité d’outrance.

Des cas de sécurité piège, à finalité davantage financière que sécuritaire, chacun pourtant en connaît. Je ne sais pas si on y a pensé, mais on pourrait aisément faire des vidéos à limitations à 50 km/h où aucun danger n’est sérieusement possible. Inversement, mais c’est à ne pas faire, on trouve des limitations à 90 km/h dans des gorges de rivière ou sur des routes de montagne où Sébastien Loeb lui-même aurait du mal à 50 km/h. C’est dire que là de fait il n’y a aucune limitation de vitesse, et que le maximum même impossible à atteindre est légal. Je vois dans ma région que des chauffards se font arrêter pour des dépassements de plus de 100 km/h. C’est évidemment énorme et blâmable et toujours dangereux. Mais c’est aussi la preuve que c’est possible. Est-il nécessaire d’y fustiger un dépassement de 20km/h, quand un dépassement de la moitié tout à fait légal en montagne entraîne par la force centrifuge le véhicule sur la voie d’en face, au risque d’une collision bien plus grave (souvenir de mes dernières vacances) ?
Deux idées de vidéos témoignages opposées (à manier avec prudence !) : Limite haute du légal, et contrainte ridicule. Limite basse du légal, et conduite objectivement dangereuse.

Réflexion sur les « peuples disciplinés » et les autres.
On envie, et à juste titre globalement, la discipline exemplaire des peuples nordiques, par rapport à l’indiscipline notoire des pays du sud (la France est à la fois sud et nord dans cette affaire). Même si les statistiques ne disent pas tout. Un pays que tous les Européens traversent en tous sens et rapidement, pour des raisons licites et illicites, peut bien avoir plus d’accidents qu’un pays de périphérie comme la Suède.
Mais les objections arrivent vite. La discipline a ses excès pervers. C’est trop facile de rappeler l’histoire de l’Allemagne, aujourd’hui surmontée d’une manière si méritoire et exemplaire. Alors on a évoqué l’Angleterre. Oui, les queues à l’entrée des cinéma ou des spectacles si magnifiquement respectées. Mais aussi les dérives habituelles des grands pays colonisateurs, sans parler des guerres d’Irlande encore que, par pur hasard, on a commencé par parler du film de Ken Loach, Le vent se lève. Où est l’exemple de haute civilisation ici ? Et le fameux fair play ? Il fut souvent battu en brèche aux derniers JO. Et hooligan est bien un phénomène d’exportation anglaise, non ? Sans jeter la pierre : on nous dit que maintenant il y en a moins en Angleterre que dans bien d’autres pays qui n’ont pas eu besoin d’être beaucoup poussés pour connaître ces excès. Bref, on a vite arrêté cette discussion. Ce sont là des notions à manier avec prudence, si on veut éviter les clichés aussi stupides qu’injustes.



Une piste pour améliorer la sécurité de nos routes…

Berry républicain 19 septembre 2014

… mais ça n’en prend pas le chemin.

Le Canard enchaîné 24 septembre 2014 



Localement, c'est peut-être ici une faute au moins partagée...

Berry républicain 18 octobre 2014


 




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