26e séance avec débat
CINÉ-DÉBAT VENDREDI 14 MARS à 20h30
LULU FEMME NUE
Fim français de Sólveig Anspach avec Karin Viard, Bouli Lanners. (2013-1h30). Scénario de Jean-Luc Gaget d'après la bande dessinée d'Etienne Davodeau.
À la suite d’un entretien d’embauche qui se passe mal, Lulu décide de ne pas rentrer chez elle et part en laissant son mari et ses trois enfants.
Elle s’octroie quelques jours de liberté, seule, sur la côte, sans autre projet que d’en profiter pleinement et sans culpabilité. En chemin, elle va faire trois rencontres décisives qui vont l’aider à se retrouver...
Dans "Lulu femme nue", tirée de la bande dessinée éponyme d'Etienne Davodeau, la réalisatrice Solveig Anspach et son scénariste Jean Luc Gaget font renaître avec drôlerie une quadragénaire devenue transparente dans sa vie, interprétée avec une impressionnante sensibilité par Karin Viard.
Jean-Luc Gaget, scénariste et co-réalisateur, qui était venu à Vierzon en 2013 pour Queen of Montreuil. |
Voici, sans attendre, la contribution de John (qui a assisté à la séance pendant que j'étais à celle du Conseil municipal des enfants):
HYMNE A LA VIE
Touchés par son film précédent projeté à Vierzon il y a un an presque jour pour jour, nous avons été subjugués par « Lulu Femme Nue » hier soir. Solveig Anspach nous plonge dans son univers à la fois désopilant avec ses personnages tragi-comiques, profondément oniriques, parfaitement taillés dans la réalité sociale, mais appartenant en même temps au monde des anges et des démons que chacun retrouve au plus profond de soi. Lulu, femme brimée au début du film car sans travail, sans amour et sans horizon, va peu à peu sortir de sa chrysalide pour toucher de sa grâce les personnes rencontrées fortuitement lors de sa renaissance. La très belle Lulu nue surgissant de l’océan est clairement une Madone, une Vénus. C’est elle à la recherche de son propre bonheur qui sera catalyseur du bonheur des personnages truculents qu’elle croisera dans sa « folle » chevauchée.
Charles le mort/morse échoué sur la plage qui vivra à nouveau une aventure amoureuse. Ses deux frères anges gardiens, prêts à tout pour le défendre et protéger son bonheur. Prêts à tout mais deux chiens de garde à peine capables d’aboyer et surtout pas de mordre. Tout est là dans cette louange du petit bonheur des simples gens. Ce n’est pas par hasard que le café un peu glauque et funeste rappelant par ailleurs le bistrot dans « Henri » s’appelle « Au Petit Bonheur ».
Lulu sans baguette magique, mais avec sa simplicité et sa gentillesse, accompagnera la vieille Marthe vers sa mort . Marthe ayant retrouvé sa pétulance en sortant de sa solitude de vieille dame coupée de la vie en attendant la mort. Ses obsèques placées sous le signe de l’espoir avec son cortège d’ adolescents. La relève est assurée, la mort cède la place à la vie.
On retrouve par ci par là des planches de bandes dessinées qui rappellent l’origine du film, de longs plans immobiles. Lulu sur le rocher, la découverte du « mort » sur la plage, le repas gastronomique inoubliable devant la caravane, et la scène du feu sur la plage par exemple.
La réalisatrice s’engage du côté de la vie, de la noblesse des sentiments, des forces vitales qui nous conduisent tous tout au long de notre parcours. A nous de ne pas nous laisser avaler par la trivialité, la bassesse et les petites violences du quotidien en nous laissant prendre, telle l’alliance de Lulu vers les turbulences engourdissantes et plongeantes du siphon final..
Des dialogues ciselés, une série de sketchs comiques inoubliables, des images de la mer magnifiques tout en douceur. Si Lulu redécouvre la vie en technicolor, le film est traité en tons pastels, les tons gris du malaise social suggéré, sous-jacent.
Dans une des dernières scènes du film, on voit un bateau au large, et on imagine aisément à bord nos trois frères clowns riant aux éclats dans une folle virée pour apporter du plaisir à Lulu, Marthe, la fille de Lulu, sa soeur et la petite serveuse. On pense au personnage de Jack Nicholson dans la scène du bateau dans « Vol au dessus d'un nid de Coucou » qui veut à tout prix faire rire ses co-pensionnaires de l’asile pour aliénés.
Le public a largement approuvé ce nid de coucous de Solveig Anspach. Comme des quilles chaque spectateur, chaque personnage du film est progressivement renversé.
CE FILM DEVRAIT ETRE REMBOURSE PAR LA SECURITE SOCIALE
Et le débat ne finit pas faute de débatteurs... Au contraire, il reprit de plus belle au pot final. Là, l'unanimité m'a paru légèrement entamée. L'opinion féminine, peut-être séduite par cette fugue par procuration, se déclarait très à l'aise et même en véritable bien-être avec ce film. Il n'en était pas tout à fait de même du côté masculin, où plusieurs aspects apparaissaient comme dérangeants. Une remarque, même d'un laudateur proclamé du film : "J'aimerais bien connaître cette extraordinaire cinéaste, Solveig Anspach... Mais elle ne doit pas être facile à vivre !" Un autre, en a parte discret mais ferme : "Mais enfin, Lulu, tout ce qui lui arrive, c'est quand même d'abord de sa faute à elle !"
On a fait état par ailleurs de la fréquence des films contemporains où l'on vit en Mobile Home, films dont un certain nombre furent proposés à Ciné-Rencontres. On a commencé par Grand Central, on a poursuivi par Mon âme par toi guérie, on le revoit ici. Est-ce un symbole du cinéma de notre époque, caractérisée par la montée des précarités, comme le fut en son temps le téléphone blanc, caractéristique d'une certaine aisance ? Il existe même un film franco-belge François Pirot (2012) qui s'est attribué le terme pour son titre.
Dans l'esprit de Louise Michel: Reykjavik International
Film Festival 2009
Louise Michel, la rebelle
Etonnant comme c’est instructif, que d’arriver au débat sans
avoir vu le film. Vous mesurez alors la spécificité qui consiste à voir un film
dans une séance en salle avec débat à suivre, la différence se remarquant non
seulement, bien sûr, avec la vision d’un film privée à domicile, mais
également, et c’est plus étonnant, avec la vision du même film à titre
individuel dans une salle du même cinéma à un autre moment.
Vous voyez devant vous un groupe façonné globalement par la
même expérience, ce qui donne immédiatement l’impression d’une grande
connivence. Les mots clés les plus étonnants traversent l’espace, suscitant au
quart de seconde les mêmes regards amusés, les mêmes sourires, chez tous les
initiés. Amusements aussi quand le béotien naguère extérieur ne perçoit pas la
saveur de stimuli comme siphon, écharpe, baleine, mobile home,…
Bienveillance également pour lui expliquer ce que de toute façon il ne pourra
jamais comprendre avec la même précision que ceux qui ont eu le privilège de
voir le film : comment se retrouve-t-elle dans cette situation, et surtout
sans argent ? C’est un conte ou c’est une histoire réaliste ? Un peu
des deux, mais dans une proportion
exacte qui n’est perceptible que par ceux qui ont « vécu » le film.
Il ne va pas même oser poser la question du titre : « femme
nue », c’est au sens figuré, elle se dépouille moralement de son passé et
c’est une façon de dire qu’elle repart de zéro, ou c’est au sens propre, et on
a la chance de voir Karine Viard, déjà si belle habillée, même si - et
peut-être parce que - elle ne correspond pas aux canons stéréotypés des
mannequins à la mode et de la mode ? Par la suite, vous pensez bien, je me
suis renseigné sur ces questions capitales : c’est bien au sens propre,
courez voir le film.
J’ai bien lu ce qu’a écrit John : Lulu, c’est Vénus et la Madone à la fois. La mer, c’est la vie et la mort à la fois. Il n’en faut pas
plus pour qu’incontinent (au sens ancien du terme, SVP) je chausse mes lourds
sabots de vieux pédant (vieux dit surtout qu’il est trop tard pour espérer que
je puisse un jour changer), et divague - à l’aide d’un discours savant produit par un
autre, c'est un alibi commode - sur la vague merveilleuse où vient surfer la déesse Aphrodite.
En outre, si vous êtes attentif dans votre lecture, vous ne manquerez pas de remarquer qu'on pourrait également faire un rapprochement avec notre précédente séance sur les mathématiques. Ces dernières sont décidément partout. Mais, après une telle sensibilisation cinématographique, on ne s'étonne plus, bien au contraire, de les trouver en bonne place dans le monde de l'art.
En outre, si vous êtes attentif dans votre lecture, vous ne manquerez pas de remarquer qu'on pourrait également faire un rapprochement avec notre précédente séance sur les mathématiques. Ces dernières sont décidément partout. Mais, après une telle sensibilisation cinématographique, on ne s'étonne plus, bien au contraire, de les trouver en bonne place dans le monde de l'art.
Sandro
Botticelli, 1486
Tempera sur toile, 172.5 x 278.5 cm
Galerie des Offices, Florence
La naissance de Vénus, scène profane, a été peinte en
1486 par Botticelli, dont les oeuvres à sujet religieux (douces madones,
enfants Jésus, images des saints) constituaient alors la quasi totalité de la
production artistique. Selon les estimations, les thèmes profanes n'en
représentaient pour leur part que 13 % ; la plupart du temps il s'agissait de
portraits.
C'est à l'apogée de sa gloire que le peintre des madones osa
entreprendre une séries de mythologies grand format. Le premier nu masculin de
la Renaissance, un jeune David en
Bronze avait été modelé d'après nature en 1430 par le sculpteur florentin
Donatello. Que cinquante années se soient écoulés entre cette oeuvre et La
Naissance de Vénus montre que les tabous instaurés par un
christianisme hostile au corps pesait davantage sur la représentation du sexe
féminin. Pendant longtemps, seules des Eve pécheresses à la pomme et au serpent
osaient se présenter dévêtues dans les oeuvres d'art, pour être bientôt punies
et chassée du paradis, courbées de honte.
L'action du tableau est facile à comprendre. Venus sort de
l'eau sur une coquille, conduite sur le rivage par le dieu du vent au milieu
d'une pluie de roses. Lorsqu'elle va poser le pied à terre, une nymphe, l'une
des Heures probablement, l'accueille avec un vêtement pourpre.
Botticelli connaissait sans nul doute la collection de
gemmes antiques des Médicis, ornées de néréides et de divinité marines et la Venus de
marbre du premier siècle avant JC. De la statuaire grecque
classique, l'artiste de la Renaissance a repris l'appui sur une seule jambe, le
séduisant déhanchement de la déesse et son geste de pudeur. Elle correspond au
"canon" que des artistes comme Polyclète et Praxitèle avaient élaboré
dans leur recherche d'harmonie et d'un idéal esthétique. Ce canon veut, par
exemple, que l'écart entre les deux mamelons soit égal à celui qui sépare les
mamelons du nombril et le nombril de l'entre-jambes. D'innombrables nus furent
exécuté selon cette règle, depuis les statues de la Grèce antique jusqu'aux
figures des sarcophages romains tardifs. Puis, elle tomba dans le discrédit et
l'oubli. Redécouverte seulement à la Renaissance, elle continue d'influencer
notre goût.
C'est aussi à cette époque que parurent les premières
éditions imprimées des textes traduits par les humanistes florentins, par
exemple les Hymnes homérique en 1488. "C'est Aphrodite, la belle, la
vertueuse, que je veux chanter/... Le souffle du vent d'ouest l'a portée/ De
l'écume jaillissante et par dessus la mer profonde/ Jusqu'à Chypre, son île,
aux rivages frangés de vagues/ Et les Heures couronnées d'or,/ L'ont accueillie
avec joie". Homère mentionne ainsi le dieu du vent joufflu en relation
avec Vénus. Il se nommait Zéphyr, soufflait de l'ouest et apportait le
printemps dans le pays. Au sujet de sa compagne Chloris, qui enlace de se
membres d'albâtre le corps brun de Zéphyr, le poète romain Ovide rapporte
qu'après l'avoir violée, le Vent la pris pour épouse et fit d'elle la déesse
des fleurs, appelée Flore
Une pluie de rose accompagne la déesse de l'amour. C'est
ainsi que le poète grec Anachréon (environ 580 à 495 av. J. C.) nous conte
qu'un buisson de roses aurait jailli de terre lorsqu'elle posa pour la première
fois le pied sur le rivage. Des roses rouge pâle enlacent la taille de la jeune
fille qui attend Vénus sur la grève. Il pourrait s'agir d'une des trois Grâces
qui, dans l'Antiquité, faisaient partie de la suite de la déesse, ou encore
d'une des trois Heures, personnification des saisons. Les anémones à ses pieds
et sa robe parsemée de bleuets annoncent l'Heure du printemps- la saison durant
laquelle Vénus faisait revenir la beauté et l'amour après les rigueurs de
l'hiver..
Au moyen-âge, on attribua les symboles traditionnels de la
Vénus antique, les roses par exemple, au personnage qui, désormais, dominait
tout et en était le pôle opposé, la Vierge Marie. Il en va de même avec le coquillage.
En relation avec la déesse païenne, il signifie, à l'instar de l'eau, la
fécondité et -en raison de sa ressemblance avec le sexe féminin- le plaisir des
sens et la sexualité. Mais lorsqu'il forme une voûte au dessus de la madone du
retable de saint Barnabé, il symbolise la virginité. On croyait, au Moyen-Age,
que les coquillages étaient fécondés par la rosée. Botticelli n'éprouvait
visiblement aucun scrupule à employer le même motif pour deux thèmes opposés
Dans sa Théogonie, écrite au VIIe siècle avant
Jésus-Christ, Hésiode parle lui aussi d'Aphrodite Anadyomème, c'est à dire
sortie des eaux : lors du combat des dieux, Chronos renversa et émescula son
père, Ouranos, le ciel. Lorsque la semence de ce dernier se répandit dans les
flots, la déesse de l'amour naquit de l'écume de la mer, fécondée par le ciel.
Cette naissance avait le caractère d'un mystère et se rattachait à des symboles
que l'on retrouve dans le tableau de Botticelli.
C'est ainsi que le manteau de pourpre présenté à la déesse
sur le rivage n'a pas seulement une fonction esthétique, mais aussi une
signification rituelle. Figurant déjà que les vases grec de l'Antiquité, il
marque la frontière entre deux domaines : le nouveau né comme le mort était
toujours enveloppé dans un linge.
La naissance de Vénus est ainsi le symbole de la
transmission de la beauté de l'ordre divin au monde des mortels. La Vénus de
Botticelli est si belle que nous ne remarquons pas la longueur artificielle de
son cou, la chute excessive de ses épaules et l'étrange façon dont son bras
gauche est relié au corps. Ou plutôt, nous devrions dire que les libertés que
Botticelli a prises avec la nature pour réaliser son oeuvre ajoutent
à la beauté en communiquant l'idée que la féminité et la délicatesse ont été
apporté sur nos rivages par un cadeau du ciel.
C'est sans doute parce que cette toile se trouvait dans une
villa des environs de Florence que Vénus fut sauvée car, bientôt, tout les
efforts des humanistes pour réhabiliter la déesse Vénus furent réduits à Néant.
Après avoir chassé les Médicis de Florence, le moine Savanarole instaura en
effet entre 1494 et 1498 une théocratie très sévère. Dans la nuit du Mardi gras
1497, il fit brûler sur un "bûcher des vanités", à côté des fards,
des bijoux et des cheveux postiches, toutes les "images lascives". Il
parait que Botticelli se serait trouvé lui-aussi du au nombre des partisans du
moine fanatique. Quoi qu'il en soit, il y avait bien longtemps qu'il ne
peignait plus de mythologies païennes ni de [Lulu] femmes nues.
Source (si j'ose dire) :
http://www.cineclubdecaen.com/peinture/peintres/botticelli/naissancedevenus.htm
On a fait état par ailleurs de la fréquence des films contemporains où l'on vit en Mobile Home, films dont un certain nombre furent proposés à Ciné-Rencontres. On a commencé par Grand Central, on a poursuivi par Mon âme par toi guérie, on le revoit ici. Est-ce un symbole du cinéma de notre époque, caractérisée par la montée des précarités, comme le fut en son temps le téléphone blanc, caractéristique d'une certaine aisance ? Il existe même un film franco-belge François Pirot (2012) qui s'est attribué le terme pour son titre.
Simon a quitté son travail et son amie en ville pour rentrer
dans son village natal où vivent ses parents retraités. Il y retrouve Julien,
son copain d'enfance, lequel vit avec son père qui se relève d'une grave
maladie.
Un soir, sur un coup de tête, ces deux trentenaires décident de réaliser un rêve d'adolescence : partir à l'aventure sur les routes. Ils achètent un camping-car, et se lancent dans leur projet avec enthousiasme, mais une panne les retarde. Qu'à cela ne tienne, ils commenceront leur voyage... sur place.
Cette première étape qui s'éternise, les petits boulots qu'ils doivent trouver pour survivre et les rencontres qui s'ensuivent leur ouvrent d'autres perspectives sur leurs désirs réels et sur cet avenir qu'ils ont, un peu vite, rêvé...
Un soir, sur un coup de tête, ces deux trentenaires décident de réaliser un rêve d'adolescence : partir à l'aventure sur les routes. Ils achètent un camping-car, et se lancent dans leur projet avec enthousiasme, mais une panne les retarde. Qu'à cela ne tienne, ils commenceront leur voyage... sur place.
Cette première étape qui s'éternise, les petits boulots qu'ils doivent trouver pour survivre et les rencontres qui s'ensuivent leur ouvrent d'autres perspectives sur leurs désirs réels et sur cet avenir qu'ils ont, un peu vite, rêvé...
L’exil est le
royaume.
Celui de Solveig Anspach, bien sûr, mais aussi celui, avant elle chronologiquement, de son héroïne : Louise Michel.
Celui de Solveig Anspach, bien sûr, mais aussi celui, avant elle chronologiquement, de son héroïne : Louise Michel.
Suivons le bon chemin pour s’en
convaincre. D’abord son site :
http://www.solveig-anspach.com/
sur lequel, dans les articles de
presse, on trouve :
Daniel Lindvall, Film International
Dans l'esprit de Louise Michel: Reykjavik International
Film Festival 2009
Cependant, la
grande révélation pour moi au RIFF est sans aucun doute The Rebel, Louise
Michel et sa réalisatrice, Sólveig Anspach. Louise Michel, anarchiste et
féministe, professeur et poète, était l'une des femmes qui ont combattu pour la
Commune de Paris au printemps de 1871, non seulement avec sa plume et ses
compétences en matière d'organisation et d'inspiration, mais aussi avec un
pistolet à la main.
Comme classes laborieuses et moyennes inférieures de Paris se
sont soulevées à la suite de la désastreuse guerre contre la Prusse lancée par
l'empereur Louis Bonaparte, et ont gouverné la ville pendant quelques semaines,
les réformes démocratiques et socialistes ont été adoptées des décennies ou
davantage en avance sur leur temps, et dans certains cas, nettement en avance
sur les versions contemporaines de la démocratie. Mais, lorsque les troupes bourgeoises
d’Adolphe Thiers reconquirent la ville, un bain de sang a eu lieu alors que des
dizaines de milliers de communards ont été sommairement exécutés. Le nombre des victimes a largement dépassé
celui de la «Terreur» infâme de la Révolution française, peut-être dix fois
plus. Louise Michel échappé à la
condamnation à mort et fut exilée avec les
4200 Communards déportés dans la colonie française de
Nouvelle-Calédonie, dans le sud-ouest du Pacifique.
Contrairement à beaucoup d'autres déportés, elle est restée
fidèle à l'internationalisme de la commune, même dans un contexte non-européen. Elle porta un grand intérêt à la
culture de la population indigène, canaque, et se mit de leur côté quand ils se
révoltèrent en 1878. C'est cette période d'exil qui fait l'objet du film de
Anspach.
Anspach n'est
pas étrangère à l'exil, quel qu’il soit. Son
père roumain-allemand et sa mère islandaise se rencontrèrent en France, se
marièrent aux Etats-Unis, et furent alors chassés vers l'Europe par
l'apparition du maccarthysme. Anspach,
elle-même, a grandi en Islande, sur les îles Westman, où, enfant, elle a connu
l'évacuation temporaire de sa ville natale en raison d'une éruption volcanique
en 1973.
Elle a fréquenté l'école de cinéma à Paris à la fin des années
1980, et a depuis travaillé largement en France et en Islande, tournant à la
fois des documentaires et des films de fiction. Son site Web se trouve à www.solveig-anspach.com. Il vaut bien une visite pour ceux qui ont
encore à découvrir son travail.
(Texte original traduit ci-dessus:)
However, the major revelation for me
at RIFF was undoubtedlyThe Rebel, Louise Michel and its
director, Sólveig Anspach. Louise Michel, anarchist and feminist, teacher and
poet, was one of the women who fought for the Paris Commune in the spring of
1871, not only with her pen and her skills in organising and inspiring, but
also with a gun in her hand. As the working and lower middle classes of Paris
rose up following the disastrous war against Prussia launched by the emperor
Louis Bonaparte, and ruled the city for a few short weeks, democratic and
socialist reforms were enacted that were decades or more ahead of their time
and in some cases far outdo contemporary versions of democracy. But when the
bourgeois troops of Adolphe Thiers re-conquered the city, a bloodbath commenced
as tens of thousands of Communards were summarily executed. The number of
victims well exceeded those of the infamous ‘Terror’ of the French Revolution,
possibly tenfold. Louise Michel escaped with her life and was instead among the
4,200 Communards deported to the French colony of New Caledonia in the
southwest Pacific. As opposed to many of the other deportees, she remained true
to the internationalism of the Commune even in a non-European context. She took
a great interest in the culture of the indigenous, Kanak, population and sided
with them as they rebelled in 1878. It is this period of exile that is the
subject of Anspach’s film.
Anspach is no stranger to exile, of
sorts. Her Romanian-German father and Icelandic mother met in France, married
in the US and where then driven back to Europe by the onset of McCarthyism.
Anspach, herself, grew up in Iceland, on the Westman Islands, where, as a child
she experienced the temporary evacuation of her hometown due to a volcanic
eruption in 1973. She went to film school in Paris in the late 1980s and has
since worked extensively in both France and Iceland, making both documentary
and fiction films. Her website can be found at www.solveig-anspach.com. It is
well worth a visit for those who have yet to discover her work.
Sur ce même site de Solveig Anspach, la première référence qu’on rencontre est la
suivante :
Divergences, revue libertaire internationale (15/03/2010), par
Christiane Passevent
http://divergences.be/spip.php?article1871#nh8
CHRISTIANE PASSEVANT
Louise Michel, la rebelle
DE SOLVEIG ANSPACH
lundi 15 mars 2010 par CP
Les femmes de l’Union des femmes pour la défense de Paris
sont très présentes et à la base du film de Watkins qui a choisi de représenter
les inconnues qui ont joué un rôle capital dans les événements de 1871. Les
femmes sont tout aussi importantes dans le film d’Anspach qui traite de la vie
en déportation, après les massacres, les procès et l’emprisonnement. Le procès
où Louise Michel lance à ses juges : « Il faut me retrancher de la
société ; on vous dit de le faire ; eh bien ! Le commissaire de
la République a raison. Puisqu’il semble que tout cœur qui bat pour la liberté
n’a droit qu’à un peu de plomb, j’en réclame une part, moi ! Si vous me
laissez vivre, je ne cesserai de crier vengeance, et je dénoncerai à la
vengeance de mes frères les assassins de la commission des grâces… […] Si vous
n’êtes pas des lâches, tuez-moi…. »
Des paroles fortes que la réalisatrice reprend lorsque
Louise s’insurge contre la séparation des hommes et des femmes au bagne. La
rébellion, mais aussi la sensibilité, la force d’une femme dont les actes et la
détermination font dire à la cinéaste : « J’ai l’impression que la
Commune, au sens large, et Louise Michel en particulier, résonnent très fort
aujourd’hui. Elle dit des choses qui font écho à ce que vivent aujourd’hui les
gens au quotidien, pas seulement les femmes mais les gens dans la misère, les
ouvriers, les travailleurs ou les sans-papiers. »
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