14ème séance avec débat
LES HERITIERS
Film de Marie-Castille Mention-Schaar avec Ariane Ascaride. (2014 - 1h45)
D'après une histoire vraie. Lycée Léon Blum de Créteil, une prof décide de faire passer un concours national d'Histoire a sa classe de seconde la plus faible. Cette rencontre va les transformer...
VENDREDI 9 JANVIER à 20h30
Il faut maintenant répondre à la question posée avant la
séance, dans la présentation du film. Rappelons qu’il s’agit de la question
impliquée par l’affirmation du Figaro : C’est un film pédago, pas un film démago.
Pour répondre à cette question, il me semble qu’on doive au
préalable se poser la question posée par le
titre : De quoi sont-ils les héritiers ?
Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron
Les Héritiers (1964)
La réponse est immédiate : d’à peu près rien. Ils ne
sont à coup sûr pas les héritiers au sens de Bourdieu, ils ne sont pas nés dans
un milieu socio-professionnel favorisé.
Et le message qu’on fait passer immédiatement, c’est que ce
n’est pas important. Que ça ne joue pas ou si peu. Qu’il ne faut compter que
sur deux choses.
D’abord il faut se prendre en charge soi-même, il suffit d’y
croire, il faut se remuer et se remonter les manches. Bref, se mettre au
travail.
Ensuite, il faut être bien guidé, bien encadré. Bref, avoir
un bon professeur.
Cette présentation est très commode. Elle évite de se poser
la question de l’injustice sociale, et son corollaire, celle des inégalités
croissantes, ces inégalités que les
statistiques dénoncent pourtant comme le fléau numéro un de notre système
éducatif, un fléau qui ne cesse de prendre graduellement de l’ampleur. C’est un
rideau de fumée derrière lequel on cache l’essentiel, la grande masse des
vraies statistiques représentatives qui décrivent la réalité éducative et la
réalité sociale.
C’est commode aussi sur un autre plan. Ça évite de faire
porter le poids de la culpabilité ailleurs que sur l’individu lui-même. Tu as
échoué ? Mais tu avais toutes tes chances, regarde dans le film ceux qui
ont réussi. Et bien sûr ça ne vaut pas que pour les élèves. De quoi se
plaignent les professeurs ? Le film ne leur laisse qu’une seule
réponde : d’être mauvais. Et là encore ce n’est pas la réalité. Combien de
vrais talents ont été sacrifiés dans des situations où il n’avaient
pratiquement aucune chance, avant qu'on ne soit obligé de courir désespérément chercher les mauvais
qui restent à pôle-emploi ou sur un site comme le Bon-coin ?
Alors en ce sens oui, le Figaro a raison. Ce n’est pas un
film démago. C’est un film fondamentalement réactionnaire.
Certes, mais n’est-il que cela ?
Il faut avoir l’honnêteté de reconnaître que le film
fonctionne, que l’émotion, qui est aussi une forme d’adhésion quoi qu’on en
dise – témoins les grands poètes de la Renaissance ou les grands dramaturges
classiques qui privilégiaient ce critère – est au rendez-vous. Plus d’un
spectateur, et pas les seules spectatrices, ont eu à effacer furtivement une
larme échappée en profitant de la protection de la salle obscure.
Et il y a autre chose. Et même on peut y déceler des aspects
réellement progressistes. On ne peut imaginer un instant qu’Ariane Ascaride, la
compagne de Robert Guédiguian (soutien du Parti de Gauche), se soit prêtée à un film socialement douteux.
Car le film montre aussi la réserve d’énergie, de volonté,
de qualités humaines et finalement de talents que recèlent ces classes par
ailleurs sociologiquement défavorisées, et volontiers sacrifiées.
En ne leur donnant pas les moyens d’avoir pleinement leur chance, la société se prive d’atouts majeurs, et à chaque fois, comme disait Gilbert Cesbron, c’est Mozart qu’on assassine. Ajoutons : et c’est toute une société, une nation entière, qui se donne un handicap lourd dans une compétition dont on nous rappelle sans cesse qu’elle est plus que jamais mondiale.
En ne leur donnant pas les moyens d’avoir pleinement leur chance, la société se prive d’atouts majeurs, et à chaque fois, comme disait Gilbert Cesbron, c’est Mozart qu’on assassine. Ajoutons : et c’est toute une société, une nation entière, qui se donne un handicap lourd dans une compétition dont on nous rappelle sans cesse qu’elle est plus que jamais mondiale.
Et ça, ce n’est pas un message réactionnaire.
Ouf ! on peut se laisser aller à apprécier ce film sans
trop de mauvaise conscience. C’est déjà un beau résultat.
Mais il y a encore bien d’autres qualités, que je ne vais évidemment pas toutes recenser.
Par petites touches, les réalités, les difficultés, les
grandeurs et les misères du milieu enseignant, tout cela est plutôt bien
montré, compte-tenu du fait que c’est une entreprise tellement difficile, que
les présenter d’une manière qui ne soit pas trop caricaturale ou aseptisée est
déjà une excellente performance.
Surtout, au sein du film, la présence et le traitement de la
déportation, l’intégration dans le film de cet étonnant – mais ils le sont
presque tous – survivant des camps de concentration qu’est Léon Zyguel est, sur
le fond comme sur la forme, d’une efficacité, dans le sens éminemment positif,
absolument exemplaire.
Et tout cela était bien sûr surdéterminé par les événements tragiques
qui viennent de frapper nos co-citoyens d’abord, et à travers eux nos valeurs
communes, notre pays, et notre modèle républicain.
Et alors qu’on aurait pu s’attendre à une petite assistance
à ce énième « film de prof », tout s’est passé comme si la famille
Ciné-Rencontres avait éprouvé le besoin, dans une salle pleine, de se retrouver
ensemble. D’abord juste pour se retrouver. Et puis aussi pour réfléchir
ensemble à se qui se passe, en se détachant un instant de l’information directe
des médias. L’importance de l’éducation, si souvent négligée depuis trop
longtemps, pour ne pas dire méprisée, est apparue alors d’une aveuglante
évidence. Et ça non plus, ce n’est pas un message négligeable, encore moins un
message inutile.
Je venais d’écrire ce qui précède quand j’ai reçu cette
contribution de JMB. Je n’ai pas rêvé – ou plutôt cauchemardé – en étant
prisonnier de ces préoccupations imposées par l’actualité. On n’est pas dans le
hors sujet en les exprimant.
Merci à Dorine pour cette contribution:
C'est toujours après-coup que
certains commentaires se précisent ! Cette fois, je regrette de n'avoir
pas évoqué l'une des scènes du film
pour voir comment d'autres que moi l'avaient ressentie.
Il s'agit de ce moment dans
l'autobus où une femme voilée propose à deux reprises sa place assise à une
dame. Celle-ci ne répond pas et s'en va .. Un beau sourire est échangé entre- je ne sais plus comment
il s'appelle- l'un de nos jeunes adolescents, celui qui est noir, et la jeune
femme, visiblement musulmane, tout à
fait sympathique.
La réaction de la dame m'a
troublée.. car je l'avoue, j'aurais bien pu avoir la même... sauf peut-être si
l'attitude très avenante de la jeune femme voilée m'avait amenée à, au moins,
lui répondre quelque chose... Le port du voile par les femmes qui vivent en
France me choque et me met tout particulièrement en colère ! Il y a le
sens prêté à ce voile dans le jeu des relations hommes/femmes. Mais c'est aussi
un signe qui m'informe abusivement de
ce qui ne me regarde pas , c'est à mes yeux un comportement impudique
manifeste – alors qu'elles justifient par leur « pudeur » le fait de
se cacher les cheveux - que d'exposer ainsi sa vie psychique intime.. Leur
croyance est brandie comme une revendication d'identité et constitue pour moi une
provocation.
Dans le film Timbuktu, on voit bien que ce voile n'est pas du tout
indispensable à la pratique religieuse musulmane et que celles qui sont
obligées de le porter aimeraient bien s'en dispenser.
Et il me semble qu'à Vierzon, j'en vois de plus en plus. Est-ce
une hallucination ?
Quel est le sens de cette
scène dans un tel film ?
Faut-il la relier à un autre
moment : une ado est agressée dans un escalier du lycée par de jeunes « macs » qui lui disent
qu'elle s'habille comme une pute. Je me suis demandé si ce n'était pas la même
jeune femme que l'on retrouvait voilée dans l'autobus et qu'elle n'avait que ce
moyen pour fuir les persécutions.
D'ailleurs, il me semble que
ces jeunes musulmanes n'ont le choix qu'entre 3 possibilités : s'habiller
« classique » et elles se font traiter de « bourges »,
suivre la mode hyper sexy des ados de leur âge et être considérées comme des
putes, ou se voiler. La dernière solution est sans doute la moins
inconfortable ! Mais elle n'est pas sans conséquence sur les relations
avec l'environnement. La jeune femme de l'autobus est-elle là pour démontrer
qu'on peut être voilée et aimable- au sens fort du mot-et que cela ne gêne pas
le « vivre ensemble » ? C'est la dame qui aurait finalement une
réaction grossière en ne répondant pas à ce sourire engageant ?
Cette question du voile et de la tenue vestimentaire court
tout au long du film. Il s'ouvre sur cette problématique avec cette jeune
voilée et sa mère qui viennent chercher le diplôme du bac, se continue au cours
du conseil de classe par l'évocation des « tenues longues » de
certaines . Je dirai en passant que j'apprécie la réponse du proviseur et
trouve qu'il a bien raison de se contenter de l'enlèvement symbolique du
foulard ! Cela se continue par la scène où le jeune converti veut
« faire un rappel » à
« son frère » qu'il n'a pas vu à la mosquée et celui-ci se
moque de sa tenue peu pratique pour faire du vélo ! Remarquons qu'il
aurait pu penser la même chose de la robe
de la femme voilée du bus ! Mais il semble plutôt échanger avec
elle un sourire complice..
En résumé, sans trop en avoir
l'air, ce film parle bien du problème des signes religieux dans l'espace
public. Je sais que je ne souhaite pas qu'ils soient interdits comme ils le
sont, très heureusement, dans les établissements tels que l'école, l'hôpital, etc.. Dans la rue, cela relève d'une
autre notion de la vie avec les autres. Quand on les arbore couramment,
n'importe où, en dehors du chemin vers les lieux de culte, c'est moi qui ne me
sens pas respectée et qui me trouve envahie. Il y a là un manque de
savoir-vivre, une impolitesse, comme quand on tient sur son portable de grandes
conversations à côté d'inconnus qui n'en ont rien à faire !
Verrai-je un jour des
musulmanes portant foulard lire Charlie-Hebdo en riant aux éclats ? Cela
pourrait peut-être me donner le goût de ce voile que j'ai tant envie de
questionner...
Voici une contribution (un
grand merci encore pour l’avoir faite) particulièrement argumentée, et qui attire
l’attention sur un des aspects du film que le débat en effet a plus effleuré
qu’approfondi, mais c’est toute la différence entre des réactions à chaud,
toutes proches de l’émotion, et a posteriori, dans le temps plus long de la
réflexion. Je me suis aperçu que j’étais moi-même plus réservé sur le contenu
(pas sur la forme, très efficace) que pendant le débat. Mais c’est à ça aussi
que sert un blog, je suppose.
Je rajouterai que le film,
avec les moyens habituels dont dispose le cinéma, modèle et oriente ses contenus. Le
résultat est l’envoi de messages conscients et maîtrisés, et d’autres qui
échappent bien entendu, comme toujours en art, aux créateurs eux-mêmes.
La séquence du bus, en effet,
a bien l’air de vouloir faire passer le message que ce n’est pas tant le voile
qui est problématique, mais la réaction - gênée, hautaine (?), en tout cas
intolérante - de la « dame normale ». Et en effet ce message
explicite est lui-même problématique. Bien montrer qu’on fait la distinction
entre le voile inadmissible au lycée, et le voile normal dans un bus ?
La scène forte du début, qui
paraît aller dans le sens inverse, n’est pas elle-même exempte
d’interrogations. Certes, la laïcité est parfaitement défendue, et avec une
fermeté exemplaire, par l’enseignante et le proviseur. C’est sans doute le
message explicite. Il peut cependant être brouillé ou lénifiant si on l’analyse
un peu plus avant.
On remarque que les
personnels sont bien seuls devant ce type d’agressivité. On n’oublie pas tout
ce qu’il a fallu d’hésitations pour ne pas dire de lâcheté politique (époque
Jospin) pour trancher la question, alors que les personnels d’enseignement et
de direction étaient longtemps livrés à eux-mêmes, quand ils n’étaient pas
désavoués par leur hiérarchie alors qu’ils souhaitaient appliquer la règlementation
laïque. (Creil, 1989).
Par ailleurs, quel est le
sens de l’évolution du chef d’établissement héroïque du début qui se mue en
récupérateur cynique de l’événement, après avoir tenté d’imposer comme un dogme
le cliché du déterminisme social ? Simple reflet de la complexité
inhérente à tout être humain ? Ou discrédit rétrospectivement jeté sur la
scène initiale ?
D’autre part, le film fait ce
qu’il veut avec la coupure du plan. Sens : Circulez, y a plus rien à
voir. Or dans la vie, c’est souvent là que les choses importantes se
jouent. Voir la scène de la remplaçante victime de l’agression de la classe.
Comment ça se résout ? Punition et remise au pas des élèves ?
Enseignante éjectée du système pour manque d’« autorité
naturelle » ? En Angleterre, pour que les cours se déroulent
normalement, on met parfois un policier près de la porte pour assurer l’ordre…
Que suggère le film de cet avenir trouble de la classe ? Plutôt
l’élimination de l’enseignante, alors que la scène ne dit rien de ses qualités
ou défaut a priori. Elimination du problème par le film en tout cas.
Globalement, par rapport à
d’autres, le film ne triche pas. Pas beaucoup. Mais il triche toujours. Témoins
les gros plans appuyés (trop, on nous prend pour qui ?) qui soulignent
quand il faut se réjouir (d’une réussite, de quelqu’un qui se fait renvoyer
dans les cordes,…). Dans ce cas, le montage pédagogique se fait montage
démagogique.
Tricher en maîtrisant le
script. On dit, on fait, même en râlant. Enlevez vos casquette, on enlève la
casquette. Changez de place, on change de place, en faisant la tête, certes,
mais on obtempère. C’est dur, mais la réalité l’est souvent beaucoup plus.
C’est loin d’être aussi simple, et ça peut durer… Au cinéma, on ne peut lasser
à ce point, ni installer ce type de malaise. Alors l’acteur obéit au scénario,
alors le monteur coupe la scène et on passe à la suite. Le problème réel est
loin d’être résolu pour autant.
Manque de soutien à
l’enseignante. Manque de soutien aux élèves. La jeune fille livrée sans défense
à l’agression du petit caïd. Quel message ? Résignation ? Invitation
à s’indigner et à trouver des solutions ?
L’intégrisme d’Olivier devenu
Mohamed. Quel sens ? L’idée qu’un néo-converti est plus agressif et borné
qu’un natif de cette civilisation ?
L’important pour moi reste
l’école cassée pour des raisons qu’on peut imaginer (concentrer et maîtriser le
pouvoir, favoriser le consumérisme passif plutôt que le citoyen actif et
remuant du fait de son esprit critique).
Quelques points (parmi tant
d’autres…) :
Une massification sauvage de
l’école baptisée démocratisation. Pauvre idée alors de ce qu’est la démocratie,
qui a bien d’autres exigences.
Une dévalorisation méthodique
de l’image de l’enseignant ( et de l’école) dans la société. Ce sont les médias
qui prennent le pouvoir (donc la pub).
Souvenir de la caricature du
journal syndical du second degré des années 80 (L’US, L’Université
syndicaliste). Dessin : un élève près du bureau, à son
professeur : « Monsieur, comment est-ce que je peux respecter
quelqu’un qui ne gagne que 1000 euros (équivalent francs) par
mois ? » Mon père gagne 4 ou 5 fois plus… Salaire des enseignants
français dans les plus bas d’Europe. Idée que ce ne serait pas un métier, alors
que c’est un des plus exigeants et usants qui soient. Que sera, dans 21 ans,
près de la soixantaine – ça sent le vieux, dit l’élève avec dédain -, après des
répétitions éprouvantes d’épreuves successives de ce genre, la « morosité
qui n’est pas la [s]ienne » de la si merveilleuse Ariane ?
La casse des mathématiques
par le scientifique Allègre. Notre point fort historique en passe de devenir un
point faible. On ne recrute plus d’étudiants pour notre fac de sciences
voisine.
Il paraît qu’après les
tragiques événements de l’actualité récente, on va se pencher sur l’école. Il
serait temps, mais on l’a tellement fait dans le passé avec les résultats qu’on
sait, qu’on peut faire preuve à cet égard d’un léger scepticisme.
Diane Kurys (1977), un film
des productions de l’avionneur Marcel Dassault.
Le film emblématique de la
dégradation de l’école dans la société. Les agressions les plus dures passent
bien mieux avec les moyens de la séduction. Y compris dans la bande son, avec
notamment la chanson sirupeuse à succès d’Yves Simon. Les profs pris pour cible
de toutes les haines et de tous les sarcasmes. Application pratique des craintes
de Paul Guth, pourtant professeur « privilégié » à Henri IV :
« Les profs, ces adultes qu’on donne en pâture aux enfants. » Le
problème, c’est quand ça déborde de l’école. Les dégâts dans toute la société
sont considérables. Il suffit de quelques années pour détruire. Il faut un
siècle au moins pour reconstruire. Même pour recruter des professeurs formés
« à court terme », le court terme doit au moins tenir compte du temps
de formation.
J’ai été le premier étonné. Ils ont laissé les élèves
faire l’école, les imbéciles, sous couvert de liberté sans limite. Ils ont pris
ce qu’on disait au pied de la lettre. Ils ont abandonné les cadres nécessaires.
(Yves Simon, France Info (en substance),
12/1/15, invité à donner ses impressions sur la comparaison entre 68 et maintenant).
Rappels :
Extrait de la
distribution :
Dora Doll :
la professeure de gymnastique en manteau de fourrure
Françoise Bertin : la professeure de
Français sévère
Jacqueline
Doyen : Petitbon
Tsilla
Chelton : la surveillante générale acariâtre
Nadine Alari :
le Censeur
Marthe
Villalonga : la professeure d'Anglais attentive
Dominique Lavanant : la professeure de
Maths manquant d'autorité
Denise Péron :
la professeure de Dessin misogyne
Arlette
Bonnard : la professeure d'Histoire dépressive
Jacques
Rispal : le concierge du lycée grincheux
Frédérique Meininger :
la professeure de Sciences
Marie-Aude Echelard :
la professeure de Chimie
SYNOPSIS
Septembre 1963. Anne, 13 ans,
et sa sœur Frédérique, 15 ans, quittent leur père à la fin des vacances pour
rejoindre leur mère qui vit séparée à Paris. C’est la rentrée des classes. Dans
les cours et les couloirs du lycée Jules-Ferry, à Paris, des essaims de jeunes
filles en fleur. Parmi elles: Anne, qui entre en 4e et sa sœur Frédérique, qui
entre en 2e.
A l’intérieur du lycée, c’est
la monotonie accablante des travaux et des cours : l’état-major autoritaire,
les professeurs plus ou moins ridicules, le folklore des chahuts improvisés, la
discipline que l’on supporte ou que l’on brave, les amitiés adolescentes.
En dehors du lycée, Anne et
Frédérique s’accommodent comme elles peuvent d’une vie de famille pleine de
tiraillements et d’incidents domestiques. Leurs parents sont divorcés. La mère
fait des efforts maladroits pour assumer son rôle d’éducatrice. Le père est à
peu près inexistant. Il gâte ses filles aux périodes de vacances et à
l’occasion de rencontres rares et furtives.
Et puis, il y a les garçons.
Frédérique a obtenu la permission de passer quelques jours de vacances en
compagnie de son amoureux. A son retour elle déclare à sa sœur choquée que tout
est fini.
Une surboum est l’occasion de
timides échanges sentimentaux. Tout est flou, bizarre, pas toujours logique. A
la porte du lycée des groupes politiques s’affrontent. Au cours d’une leçon
d’histoire très détendue, une élève fait le récit des « événements de
Charonne » (manifestation antifasciste brutalement réprimée par les forces
de l’ordre).
L’année scolaire se termine
par une représentation théâtrale donnée par les élèves. Ambiance plus triste
que gaie, bal sinistre. Et de nouveau, les grandes vacances avec papa, au bord
de la mer.
Lu sur le blog de quelqu’un
de représentatif (qui aime beaucoup) :
Qui dit retranscription dit
aussi rappel de tous ces souvenirs hilares, de toutes ces anecdotes
universelles des élèves qui se moquent royalement de leurs professeurs, dénués
d'autorité pour certains (pauvre Dominique Lavanant qui en prend plein la tronche)
et complètement barjots pour d'autres (la prof de dessin).
(…)
Diabolo menthe se doit
donc d'être clairement consommée comme une boisson car rafraîchissante,
poétique et surtout très drôle de nostalgie. Plongé dans le beau Paris à la
veille d'une révolte qui changera à jamais sa face, le film est magnifique et
constitue alors une petite perle dans la cinématographie française. A consommer
toutes saisons confondues.
BROOKLYN CASTLE de
Katie Dellamaggiore (2012)
Brooklyn Castle est un documentaire sur l'un des meilleurs clubs lycéens d’échecs des Etats-Unis. Mais les restrictions budgétaires, à cause de la crise, menacent cette organisation.
Brooklyn Castle est un documentaire sur l'un des meilleurs clubs lycéens d’échecs des Etats-Unis. Mais les restrictions budgétaires, à cause de la crise, menacent cette organisation.
Autre rapprochement
pertinent, concernant la question économique occultée du film, ou minimisée (On
pique une crise, mais on fait des miracles avec des bouts de ficelle et on
trouve toujours la photocopieuse du secrétariat administratif pour dépanner à
temps). Que retient-on ? Que le manque de moyens pour travailler est
scandaleux ? Ou qu’on finit toujours par trouver une solution avec un peu
de bonne volonté ? Là encore, on reste dans l’entre-deux.
Ce n’est pas le cas avec Brooklyn
Castle. Même point de départ et fil directeur. Le triomphe d’une classe
d’un quartier défavorisé dans un concours hyper sélectif (les échecs au niveau
national). Même glorification de l’investissement collectif et individuel, même
explosion de joie (comme dans La famille Bélier) quand arrive le jour de
gloire. Mais l’hypocrisie concernant à occulter que tout cela quoi qu’on fasse
a un coût n’est pas de mise. Exceptionnellement, l’horrible cynisme (bonne
conscience et absence de complexe, voire de scrupules) que l’on attribue aux
Américains dans le domaine de l’argent et de l’arrivisme, est plutôt une vertu.
Le film commence avec les problèmes de financement qui vont condamner une
filière de réussite du fait de la défaillance des crédits habituellement
alloués par les pouvoir publics. Mais on ne fait pas sans. On se bat pour en
obtenir, en faisant pression, en frappant à toutes les portes, en se
mobilisant. Bien sûr que l’argent est aussi le nerf de la guerre, et là il
n’est pas question de cacher le problème sous le tapis.
Voir si on le souhaite ce que nous disions de ce film quand nous l'avions déjà rapproché de Dancing in Jaffa:
http://cinegraphe.blogspot.fr/2014/06/dancing-in-jaffa.html#more
La question du travail en
équipe. Peu performant en France malgré un exemple cinématographique :
L'École buissonnière est
un film français réalisé par Jean-Paul Le Chanois et sorti
en 1949. Ce film marque un temps fort de
l'histoire du cinéma d'après-guerre :
il romance les débuts de la pédagogie de Célestin Freinet, à travers le personnage d'un
jeune instituteur, M. Pascal, campé par Bernard Blier.
J'ai vu un film, il s'appelle Les Héritiers, il faut aller le voir, il montre que c'est possible.
Certes, mais qu'on voie aussi pour être réaliste les réserves critiques de ce blog.
D'autres témoignages, dans les classes où plus de la moitié des élèves pensent que rien ne s'est passé et que tous ces événements ne sont que des montages médiatiques (autorité principale ; les réseaux sociaux). Le discours performatif des politiques est sans doute nécessaire, il n'est pas pour autant suffisant. Je veux que... Je ne veux pas que... c'est très efficace devant un public de députés, ou dans un film au scénario parfaitement ficelé d'avance.
Beaucoup moins dans les classes statistiquement significatives. Malgré les efforts de la mise en scène qui visent à nous faire croire qu'on a affaire à des loups impitoyables, on voit bien très vite qu'on a affaire à des agneaux gentils, intelligents, et pleins de ressources et de bonne volonté.
Pour une réaction mitigée du même type on peut se reporter à :
La cour de Babel
Actualité en résonance avec l'esprit et le titre du film.
Principe -
Rassurant:
La laïcité nous y tenons comme à la prunelle de nos yeux.
Constat -
Lucide:
Les incidents sont importants et ils sont graves.
Honnêtement, à l’heure qu’il est, je peux vous le dire,
l’école n’est pas à la hauteur dans cette mission. Ce n’est pas faute d’enseignants
de valeur, d’enseignants qui souhaitent transmettre ces valeurs.
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