Pourquoi "Bis"? Parce que le film a déjà été présenté par Ciné-Rencontres le 12 octobre, devant un public essentiellement adulte.
18e séance avec débat
Intouchables, le film phénomène d’Omar Sy et
François Cluzet (Olivier Nakache et Eric Toledano sont quand même les
réalisateurs, ne les oublions pas) sorti en 2011. Après une année
d’exploitation intensive, lorsque Farid nous a dit que le choix des enfants du
Conseil Municipal s’était porté sur ce film, nous avions quelques craintes de
désaffection. Nous n’avons rien changé, et nous nous en sommes félicités :
ce fut le 30 mars 2012 une soirée mémorable, une séance record. La salle était pleine à
craquer.
Alors quand
Bertrand (le nouveau responsable du Service des Affaires scolaires de Vierzon,
soit le sympathique successeur du non moins sympathique Farid auquel nous
souhaitons bon vent dans ses nouvelles fonctions) nous a parlé du choix de ce
premier trimestre de l’année scolaire 2013-2014, nous avons vécu comme un
remake de l’épisode précédent. En effet, la première réaction de Bertrand fut
de penser « dommage » quand je lui eus appris que le film choisi
cette fois par les enfants, Sur le chemin de l’école, venait de faire
l’objet d’une soirée de notre association Ciné-Rencontres le 11 octobre
dernier. Mais rapidement – pas le même public, un film qui fait pratiquement
l’unanimité, le choix des enfants à respecter, le précédent d’Intouchables,
… - les arguments en faveur du maintien du film choisi se sont très vite
imposés.
Et la
confirmation du succès fut effectivement au rendez-vous. Quelque 160 personnes,
en majorité des enfants, ce qui est logique, ont envahi la salle 3 du
Ciné-Lumière et, à la fin de la projection, n’ont pas manqué d’applaudir le
film qu’ils venaient de voir.
Le public commence à s'installer, et la salle est déjà bien remplie. |
Les écoles
primaires vierzonnaises étaient évidemment fortement représentées, accompagnées
de leurs enseignants, mais d’autres également étaient là, notamment le collège
Albert-Camus qui bénéficie d’un club cinéma. Leur sésame original commun à tous
cette fois : un élément de matériel scolaire en bon état.
Ce fut
l’occasion d’une petite leçon de géographie vivante bien qu’impromptue. Par les
images ou les témoignages, nous voyageâmes ainsi des Indes en Patagonie, de l’Afrique
de l’Est à l’Atlas maghrébin, et même des Comores en Guyane. Quand quelqu’un
évoqua Grande Terre, nous fûmes nombreux à penser à la Guadeloupe, mais il
s’agissait plutôt de la Grande Terre de Mayotte avec le témoignage d’un
collègue de l’enseignante qui avait pris la parole précédemment, laquelle enseignait là-bas et était venue, après un long périple, passer les fêtes à Vierzon. Nous étions bien toujours dans l’Océan Indien.
Encore un peu de patience... |
... et les enfants s'expriment. |
L'impression est trompeuse: John maîtrise parfaitement la situation.! |
Pour leur première soirée de vacances, les enfants ont eu le courage de retourner, en quelque sorte, Sur le chemin de l'école. Leurs témoignages sont concordants: ils tiennent à leur école. Feraient-ils les mêmes efforts pour s'y rendre? Certains ont encore répondu par l'affirmative.
Une question sur le cri particulier entendu dans le film : de quel animal provenait-il? Un enfant, qui avait zappé le contexte effrayant de la savane préparatoire à la question, répondit avec conviction : "Un paon!" Manifestement il avait été frappé par l'univers sonore de l'Inde davantage que par les rugissements de l'Afrique. Tant pis pour les lions qui se prennent pour les rois des animaux.
Autre question : le film est-il optimiste ou pessimiste? Les enfants ont été unanimes pour la première option.
Rappel de quelques chiffres effrayants après ce film résolument optimiste: 57 millions d'enfants dans le monde sont privés d'école, et les guerres sont les causes les plus évidentes. En Syrie, par exemple, 2 millions d'enfants sont malheureusement concernés. (UNESCO). A Madagascar, les parents n'envoyaient pas leurs enfants à l'école s'ils n'avaient pas toutes les chances d'aller jusqu'au lycée. La situation changea du tout au tout quand la publicité fut faite sur les statistiques des salaires, favorables aux enfants ayant fait des études primaires par rapport à ceux qui en ont été privés. Le retour sur investissement devenait clair. (Radios).
Il est curieux de remarquer à cette occasion combien l'immersion au milieu d'un public particulier influe sur votre perception du film. J'avais la première fois un point de vue essentiellement adulte, largement centré sur la perception de l'enfance au milieu d'une société donnée. Cette fois, les sujets d'émerveillement l'emportaient irrésistiblement, et l'attention portée sur les animaux - la poule trimbalée dans le sac - ou les friandises occasionnelles faisaient comme l'objet d'un prisme grossissant. Y contribuaient certainement les échos ponctuels (les enfants vivent pleinement l'action en direct) comme celui-ci :"Il fallait pas passer par là! Non! Il fallait pas!" quand les jeunes Indiens poussaient péniblement leur frère et risquaient l'enlisement dans un cours d'eau où ils s'étaient imprudemment aventurés. Le point de vue de l'enfance était tellement majoritaire qu'il se faisait contagieux.
Malgré tout, l'horaire de fin de séance, vers 22 heures, se devait d'être respecté, et un enfant ayant une montre, sollicité auparavant en ce sens, remplit parfaitement son rôle à 21 heure 45 exactement. C'était un peu dommage cependant, car les témoignages de fin de séance étaient d'une étonnante originalité. Des enseignants venus de Mayotte, et d'autres ayant reçu à Vierzon des collègues de Guyane, faisaient tous le même constat, celui du manque de structures scolaires. En Guyane, il fut même question de véritables discriminations de fait. La proximité de la période de Noël nous rappelait une évidence que nous avons pourtant trop tendance à oublier: la France ne se résume pas à la seule métropole. De même que la température moyenne en France en hiver doit être relevée (par exemple, il peut faire 30° actuellement aux Antilles ou à Nouméa), le manque d’écoles en France doit manifestement lui aussi être réévalué à la hausse.
Une question sur le cri particulier entendu dans le film : de quel animal provenait-il? Un enfant, qui avait zappé le contexte effrayant de la savane préparatoire à la question, répondit avec conviction : "Un paon!" Manifestement il avait été frappé par l'univers sonore de l'Inde davantage que par les rugissements de l'Afrique. Tant pis pour les lions qui se prennent pour les rois des animaux.
Autre question : le film est-il optimiste ou pessimiste? Les enfants ont été unanimes pour la première option.
Rappel de quelques chiffres effrayants après ce film résolument optimiste: 57 millions d'enfants dans le monde sont privés d'école, et les guerres sont les causes les plus évidentes. En Syrie, par exemple, 2 millions d'enfants sont malheureusement concernés. (UNESCO). A Madagascar, les parents n'envoyaient pas leurs enfants à l'école s'ils n'avaient pas toutes les chances d'aller jusqu'au lycée. La situation changea du tout au tout quand la publicité fut faite sur les statistiques des salaires, favorables aux enfants ayant fait des études primaires par rapport à ceux qui en ont été privés. Le retour sur investissement devenait clair. (Radios).
Il est curieux de remarquer à cette occasion combien l'immersion au milieu d'un public particulier influe sur votre perception du film. J'avais la première fois un point de vue essentiellement adulte, largement centré sur la perception de l'enfance au milieu d'une société donnée. Cette fois, les sujets d'émerveillement l'emportaient irrésistiblement, et l'attention portée sur les animaux - la poule trimbalée dans le sac - ou les friandises occasionnelles faisaient comme l'objet d'un prisme grossissant. Y contribuaient certainement les échos ponctuels (les enfants vivent pleinement l'action en direct) comme celui-ci :"Il fallait pas passer par là! Non! Il fallait pas!" quand les jeunes Indiens poussaient péniblement leur frère et risquaient l'enlisement dans un cours d'eau où ils s'étaient imprudemment aventurés. Le point de vue de l'enfance était tellement majoritaire qu'il se faisait contagieux.
Malgré tout, l'horaire de fin de séance, vers 22 heures, se devait d'être respecté, et un enfant ayant une montre, sollicité auparavant en ce sens, remplit parfaitement son rôle à 21 heure 45 exactement. C'était un peu dommage cependant, car les témoignages de fin de séance étaient d'une étonnante originalité. Des enseignants venus de Mayotte, et d'autres ayant reçu à Vierzon des collègues de Guyane, faisaient tous le même constat, celui du manque de structures scolaires. En Guyane, il fut même question de véritables discriminations de fait. La proximité de la période de Noël nous rappelait une évidence que nous avons pourtant trop tendance à oublier: la France ne se résume pas à la seule métropole. De même que la température moyenne en France en hiver doit être relevée (par exemple, il peut faire 30° actuellement aux Antilles ou à Nouméa), le manque d’écoles en France doit manifestement lui aussi être réévalué à la hausse.
Au moment de se séparer, presque en "off", un spectateur passionné d’athlétisme
a tenu à nous signaler le cas du coureur éthiopien au palmarès impressionnant, Haile Gebreselassie, dont les
jeunes années ressemblent à celles de Jackson.
Haile
Gebreselassie est un coureur de fond
éthiopien, né à Assella dans l'Arsi le 18 avril 1973. Il a remporté deux
médailles d'or aux Jeux olympiques et huit aux championnats du monde
d'athlétisme (quatre en salle et quatre en plein air) sur des distances allant
du 1 500 mètres au 10 000 mètres.
Auteur de
nombreux records du monde sur des distances allant du 2 000 mètres au marathon.
Né dans
une famille de dix enfants à Assella dans la province Arsi, il doit parcourir
une distance de dix kilomètres pour se rendre à l'école depuis la ferme
familiale. Il imite ses idoles, les champions olympiques Abebe Bikila et Miruts
Yifter, en parcourant cette distance en courant. À seize ans, il participe à
son premier marathon, qu'il termine en 2 h 42 min.
Patagonie. Le gaucho (cow-boy d'Amérique du Sud) a été remarqué, en effigie colorée munie de ses bolas, dans un petit sanctuaire à la croisée des pistes. Un peu d'encyclopédie à cette occasion :
Les mots espagnols bolas ou boleadoras désignent une arme de jet comprenant plusieurs masses sphériques réunies par des liens, destinées à capturer les animaux en entravant leurs pattes. Les bolas au sens strict sont connues chez les gaúchos d'Amérique du Sud mais certains équivalents plus anciens ont également été découverts dans les fouilles archéologiques d'occupations pré-hispaniques, en particulier en Patagonie, où les peuples autochtones les utilisaient pour capturer les guanacos (« lamas » sauvages) et les nandous (« autruches » d’Amérique du Sud).
Reportage ARTE 29 décembre 2013: Quand la tablette remplace le maître.
Depuis février 2012, 20 enfants d'un village éthiopien ont reçu une tablette. Livrés à eux-même, ils se servent des tablettes et de leurs programmes éducatifs avec lesquels ils apprennent à lire, à compter, et à trouver des informations. C'est un projet du MIT conçu à Boston. Les panneaux solaires rechargent les tablettes (pas d'électricité dans le village, les tablettes le soir éclairent les cases). Les grands-parents apprennent aussi, et sont visiblement fiers de réciter l'alphabet à leur tour. "Les enfants du volcan" sont les premiers concernés par ce programme qui doit s'appliquer ailleurs en Ethiopie. On ignore encore quel sera l'avenir de cette démarche.
Puisque les enfants sont les héros du film,
on peut être tenté de repenser à d’autres films de cette
catégorie.
En puisant dans nos propres séances antérieures avec le Conseil municipal d'enfants.
La nouvelle guerre des boutons (Christophe Barratier, 2011). Séance du 29 juin 2012.
Les enfants de Timpelbach (Nicolas Bary, 2007). Séance du 30 novembre 2012.
(Berry républicain, 3 décembre 2012) |
Couleur de peau miel (Jung et Laurent Boileau, 2012). Séance du 29 mars 2013.
Zarafa (Rémi Besançon, 2012). Séance du 14 juin 2013.
Par ailleurs, un guide se propose, que nous ne nous priverons
pas de suivre.
Photogramme de couverture :
Peter Weir (le cinéaste du Cercle des poètes disparus, 1989), Witness (1984).
"Ce regard, cette frimousse aux grands yeux médusés dans l'entrebâillement d'une porte... scène... où Samuel assiste à un meurtre."
Puisque la quête - le Graal - de ces enfants héros est l’école,
reportons-nous de préférence au chapitre qui traite de ce
sujet.
Quatrième partie : Le cinéma et les lieux de l'enfance. P. 159: L'école.
Beaucoup de films dénoncent ces "lieux de stagnation et d'étouffement "(comme la famille traditionnelle, objet du chapitre précédent).
Avant: la littérature. Colette (Claudine à l'école), Musil (Les désarrois de l'élève Toerless), Daudet (Le Petit Chose), Alain-Fournier (Le Grand Meaulnes).
"Pensionnats concentrationnaires", goût de la liberté. Jean Vigo (Zéro de conduite), Lindsay Anderson (If), Truffaut (Les quatre cents coups), Christian-Jaque (Les disparus de Saint-Agil), Alan Parker (The wall).
Emotions, amitié, sentiments, perversité. Jean Delannoy (Les amitiés particulières), Louis Malle (Au revoir les enfants), André Cayatte (Les risques du métier).
Nostalgie et réconciliation. Marcel Pagnol (Merlusse), Jean-Paul Le Chanois (L'école buissonnière).
Avant: la littérature. Colette (Claudine à l'école), Musil (Les désarrois de l'élève Toerless), Daudet (Le Petit Chose), Alain-Fournier (Le Grand Meaulnes).
"Pensionnats concentrationnaires", goût de la liberté. Jean Vigo (Zéro de conduite), Lindsay Anderson (If), Truffaut (Les quatre cents coups), Christian-Jaque (Les disparus de Saint-Agil), Alan Parker (The wall).
Emotions, amitié, sentiments, perversité. Jean Delannoy (Les amitiés particulières), Louis Malle (Au revoir les enfants), André Cayatte (Les risques du métier).
Nostalgie et réconciliation. Marcel Pagnol (Merlusse), Jean-Paul Le Chanois (L'école buissonnière).
Puisque c’est Noël,
privilégions le film emblématique de la réconciliation entre
le monde des adultes et le monde des enfants.
A Noël, une vingtaine d’élèves du lycée Thiers de Marseille ne peuvent
rentrer dans leurs familles et doivent passer les fêtes à l'internat. Ils sont
sous la surveillance de Blanchard (Henri Poupon), pion qui terrifie les élèves
par son allure d’ours, son œil aveugle et son visage sévère orné d'une barbe
clairsemée. Mais ce soir de Noël, ils vont apprendre à connaître vraiment celui
qu'ils surnomment Merlusse, rapport à l'odeur de poisson qu'il répandrait
autour de lui...
Merlusse démarre comme une fable assez sombre
sur la laideur, sur la perception que l’on a de l’autre, sur la peur stupide de
ce qui est différent. Il y a d’un côté les préjugés des enfants à l’encontre de
ce surveillant à l’allure suspecte qu’ils surnomment Merlusse, de l’autre ceux
des enseignants qui voient dans ces élèves indisciplinés et sans famille de la
graine de racaille. Personne dans l’établissement n’est capable de voir
l’autre. Chacun est dans son rôle, à faire des bêtises ou à sévir. Mais comme
c'est aussi un conte de Noël, tout ce que le récit peut avoir de cruel
s'évapore tandis que les enfants acceptent de voir qui est réellement Merlusse.
Il est tout comme eux un
mal aimé qui trouve du réconfort en se consacrant corps et âme à sa mission
d’enseignant. Il est attentionné, prévoyant, mais il contient tout élan de
tendresse et l'on devine que son physique ingrat lui a valut par le passé
beaucoup de souffrance et de brimade. Tout son coeur va ainsi à ces enfants qui
sont eux aussi écartés du monde, confinés dans l’enceinte de l’établissement
alors que dehors les familles célèbrent Noël.
Reposant sur une intrigue
squelettique, Merlusse est un film très simple, très sobre,
tout en retenue. Pagnol ne joue pas sur les grands sentiments, les grands
drames si bien que le « Qui dois-je remercier ? » de Poupon lorsqu’il reçoit les
cadeaux des enfants nous frappe en plein cœur. C’est ainsi que ce petit film,
qui ne joue ni sur le folklore, ni sur le brio des dialogues, nous bouleverse
tout autant que les grandes œuvres du cinéaste.
... et dans les actions.
Berry républicain 14 mars 2014 |
Un (double) Prix Nobel de la Paix d'octobre 2014 qui n'est pas sans rapport...
Le prix Nobel de la paix a été décerné conjointement à la Pakistanaise Malala Yousafzaï et à l'Indien Kailash Satyarthi, tous deux activistes des droits des enfants.
(Voir Actu novembre 2014)
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