dimanche 3 juin 2018

PAUSE CRITIQUE MAI 18

avec Francis de Laveleye
(producteur et maître de conférences à l’Université Libre de Bruxelles)












EN GUERRE
LE CERCLE LITTERAIRE DE GUERNESEY
MONSIEUR JE SAIS TOUT





Photo : il est venu à Vierzon, avec sa femme France Brel :

(Un grand merci pour nous avoir donné l'autorisation de diffuser ses critiques sur notre blog.)



FILMS MAI


490 
Isle of Dogs de Wes Anderson

Il n'y a pas de quoi fouetter un chat. Lorsque, comme moi, l'on n'apprécie ni la bande dessinée, ni le dessin animé (ni les chiens) il faut une sacré dose de scrupules professionnels pour aller tout de même voir ce film qui est admirablement fait. Les chiens et autres caractères sont très bien caricaturés, l'ambition est riche et complexe de créer un conte moral sur notre époque, mais le bavardage incessant casse la tête et le simplisme des séquences laisse pantois ; c'est infantile.

Alors reste l'intention de faire rire ; qui ne déride personne comme je le notais déjà à regret pour Le Grand Budapest Hôtel (n° 71)

Les spécialistes de l'animation en stop motion, en 2 et 3 D, les maquettes créées par imprimantes 3 D, et mille autres tours de métiers admirables, pourront se gausser du travail hallucinant qu'un tel film demande. Et les cinéphiles nippons - mais pas seulement - retrouveront une esthétique, des allusions, des codes bien à eux.

Tout ce magasin d'accessoires et de savoir-faire, hélas, n'a pas réussi à créer une œuvre forte.

491

Amoureux de ma Femme de Daniel Auteuil

Mais pas amoureux du film. Ça démarre très bien, sur une bonne idée, celle déjà exploitée du " repas, du dîner " dont on sait qu'il sera révélateur de mille choses et qu'il va tourner au pugilat. Ici, un couple reçoit l'ami de toujours avec sa nouvelle compagne.

Auteuil et Depardieu sont d'immenses comédiens et rien que l'idée qu'ils doivent se commettre dans ce genre boulevardier, de comédie franchouillarde, fait mal au cœur. Sandrine Kiberlain se défend pas mal dans les deux ou trois scènes qui lui laissent une petite place, en plus de quelques répliques supposées devenir culte. Adriana Ugarte dans le rôle stéréotypé de la belle idiote ne manque pas de charme.

Mais le film, dès que le principe comique est en place, se répète, tourne en rond et jamais ne décolle. Ce qui nous laisse tout le loisir de contempler le comble du stylisme du cinéma français, catalogue de Femme d'Aujourd'hui et autres revues style " Ma Maison " qui sont un désastre de médiocrité sans style, sans caractère. Ce qui contribue à plomber le film. Comme une pierre plate lancée pour faire des ricochets, le scénario rebondit de moins en moins pour finir par s'abîmer pitoyablement.

Et petit couplet sur le détournement de l'argent publique des contribuables belges, le Tax Shelter a été une fois de plus détourné de façon éhontée pour permettre une coproduction " belge " qui, si elle est défendable techniquement ne correspond strictement en rien à la défense de notre cinématographie. (Je salue ici Henri Morelle, l'ingénieur du son grâce à qui sans doute, pour une fois, les dialogues de ce film français sont intelligibles)

492

En Guerre de Stéphane Brizé

Une victoire, une réussite exceptionnelle, un film rare, dans lequel Vincent Lindon est au sommet de son art, parfaitement intégré dans une cohue d'autres personnes "vraies" comme il est exceptionnel d'en voir dans le cinéma français. Le sujet est simple : une entreprise va fermer, ce qui provoquerait un " licenciement sec " de 1.100 personnes. Et nous assistons à leur lutte. Façon reportage télé. Bien entendu tout cela est admirablement mis en scène, avec une fluidité éblouissante, un sens du rythme, du montage, qui nous tient en haleine. Et des moments " intimes " qui ajoutent un grand supplément d'humanité à ce combat de David contre Goliath.

Dans la cinématographie militante, et singulièrement française, il me semble que rarement des sujets de luttes sociales ont été si bien rendus, vécus de l'intérieur.

Et, n'en déplaise au déplaisant critique qui spoile les films à la RTBF et donne son avis comme s'il était la Vérité, ce film tient en haleine, est touchant et mérite d'être défendu pour ceux dont il prend la défense.

493

Foxtrot de Samuel Maoz

Film exigent, très haut de gamme, d'une qualité, d'une intelligence rare, mais austère. Film israélien et cela n'est pas indifférent, même si le pays est peu présent. Mais un aspect quotidien de la vie de ses citoyens tient le rôle central.

Le film est très " construit " en 4 chapitres (et non 3 comme écrit dans d'autres textes de commentaires).

Nous vivons d'abord un huis clos qui est très dramatique. Filmé avec une distinction, une élégance parfaite, rare.

Puis nous suivons le quotidien d'un post frontière, oublié du genre humain. Le style narratif change radicalement : nous entrons dans un langage métaphorique, allégorique et symbolique. Le tout avec beaucoup de retenue, mais la scène de l'enfouissement de la voiture va faire couler beaucoup d'encre dans les cénacles cinématographico-littéraire.

Puis vient le troisième chapitre, tout à fait surprenant, incompréhensible d'abord, où l'on retrouve le couple dans son appartement, en proie aux pires démons que sont la mort et les réminiscences d'un douloureux passé.

Puis le bref quatrième chapitre qui est le dénouement de nos incompréhensions.
Tout au long de ce récit qui prend son temps (parfois un peu trop, c'est vrai) nous pensons à ce qu'est la représentation des émotions fondamentales de la personne humaine. Ici elles sont incarnées de façon brillante, singulière et passionnante.

494

Mon Ket de François Damiens

Ne vaut pas tripette. Et pourtant, quel tapage médiatique ... Un rideau de fumée. Certes il y a deux choses remarquables dans le film : l'incroyable dispositif qui permet de filmer à leur insu, des gens ordinaires qui accepteront, pour vivre un moment de gloire de foire de province, d'être ridiculisés et méprisés de façon le plus souvent vulgaire. Et François Damien qui est remarquable d'ingéniosité et de sens de la répartie, lui qui a, d'ordinaire un regard de poisson et une expression faciale d'insuffisant mental. Le travail admirable de Kaatje Van Damme, la maquilleuse, y est pour beaucoup. Comme le travail sur les costumes, absolument génial, de Catherine Marchant qui campe des personnages en un T-Shirt trop court, un blouson improbable, une paire de chaussures impensables...Ici, François Damiens est truculent, même si sa sphère d'action est très généralement en dessous de la ceinture. Quand personne ne prétend le diriger, FD arrive à faire le bateleur.

Les problèmes de ce film me semblent être de trois ordres.
Il y a des personnages complices et d'autres piégés. Les complices sont totalement sans substance, leurs liens avec FD sont aux abonnés absents, même la relation avec le fils est strictement instrumentalisée, sans aucun affect et pas la moindre crédibilité. Le gosse apparait pour les besoins des farces de son " père ", un point c'est tout.

La structure du film ne réussit pas à cacher l’indigence de ce qui est prétendument un " récit " alors que ce sont des collages de gags successifs sans réelle cohésion. Bien entendu, on rit, un peu. Et la sale restée généralement bouche baie, se vide dans une ambiance de consternation.

Enfin le rythme du film est poussif, les passages de gag à gag sont souvent laborieux, sans aucune vraisemblance, sans le moindre début de continuité, de construction ou de cohérence.

La seule chose qui laisse pantois, c'est la découverte d'un acteur qui ne manque pas de caractère, mais qui patauge dans la vulgarité.

495

7 Days in Entebbe de José Padilha

Film à voir absolument. Car il présente 3 qualités très rarement gérées à un tel niveau avec une aussi belle maîtrise.

Raconter de façon palpitante des faits historiques qui, certes, remontent à plus de 40 ans (juillet 1976), mais qui ont marqué les mémoires de façon essentielle.

Donner à ces événements une dimension qui les dépasse, celle de la responsabilité politique, de la place des hommes de pouvoir dans un processus qu'ils ne peuvent seuls, maîtriser.

Oser une construction dans laquelle s’insèrent différents niveaux de langage cinématographique, allant des archives d'époque, aux scènes de vie privée (ne ratez pas la conversation au téléphone depuis un appareil public), avec le recours à la métaphore symbolique d'une chorégraphie fascinante, le tout dans ce que l'on pourrait qualifier de " film choral ".

3 films déjà se sont inspirés de cette épopée. Il devrait être intéressant de les analyser tous les 4, par comparaison.
Puisqu'il n'y a pas grand risque de " spoiler ", parlons d'abord du détournement de l'avion par des orphelins de la Rode Armee Fraction  à la dérive. Sorte de descendants de Lénine, Trotski, Staline, Mao et Pol-Pot en mal d'idéologies révolutionnaires rédemptrices qui ne débouchent que sur des boucheries. Les personnages sont bien cernés, leurs propos suffisamment développés dans des dialogues brefs, riches et très charpentés. Leurs parcours sont montrés en flash back, seule transgression de la narration linéaire qu'impose l'idée du récit de ces 7 journées.

La façon dont leur audacieuse action de pirate de l'air est récupérée par d'autres (FPLP, le Front populaire de Libération de la Palestine), inspirés par cette idée mal fondée que contre l’État d’Israël il est possible de lutter par les armes, ce versant du récit est aussi très bien montré dans sa diversité, sa passion messianique et sa folie destructrice.

Nous sommes, pour une fois, et grâce au recul que permet l'Histoire, au cœur palpitant du mécanisme des décideurs israéliens : élus et militaires. Shimon Perez (à la défense) et Yitzhak Rabbin (premier ministre) me semblent remarquablement campés, et leurs antagonismes, aussi murmurés que irréductibles, sont proposés pour que le public comprenne que là, ces événements ont été un basculement historique. On ne négocie jamais avec les preneurs d'otages. Certes. La détermination à sauver ses nationaux, où qu'ils soient et quelques soient les circonstances, est exprimée avec autant de nuance, de paradoxe et d'efficacité qu'il convient.
Inutile de préciser que le point Goldwin est présent en de nombreuses séquences du récit. D'une façon qui oblige à se poser sérieusement la question que soulève l'instrumentalisation de l'histoire pour justifier ses actions les plus désespérées et dépourvues de la moindre chance de réussite. Idi Amin Dada est ressuscité dans nos mémoires, sans excès de ridicule pour ne pas tomber dans la caricature.
Beaucoup de choses pourraient être dites sur le versant historique du film ; car il est passionnant. Si cette production anglaise réalisée par un brésilien est évidemment " politiquement correcte " elle n'est pas hagiographique et par maints aspects, elle laisse place à la confrontation des points de vue. Et je voudrais souligner la force admirable des images de chorégraphies à découvrir qui accompagnent le récit et, au moment de l’assaut, lui donne une puissance émotionnelle exceptionnelle (aidée par un léger ralenti des images de combat...)
Gregory Burke, le scénariste, mérite d'être salué pour un travail d'une richesse et d'une complexité très maitrisée. Comme les décorateurs qui ont reconstitué une époque sans téléphone portable et pratiquement sans ordinateur. La musique de Rodrigo Amarante m'a semblé très adéquate.



496

La Mauvaise réputation (What will people say) de Iram Haq

Faites une bonne réputation à ce film : il en vaut largement la peine. Le récit auto-biographique de la réalisatrice nous montre une famille pakistanaise classique parfaitement intégrée dans son exile en Norvège. Mais les usages, les codes, les contraintes issues de la tradition restent la seule règle qui dirige la famille. La jeune fille adolescente va y être très durement confrontée.

Le film est structuré en 3 chapitres, le deuxième se déroulant au Pakistan. Tout est captivant et les interprètent communiquent admirablement leurs tentions intérieurs, leurs frustrations, leurs envies et leurs colères. Au delà du récit proprement dit, parfois un peu longuet, il y a une méditation sur la place de la femme dans la société qui nous interpelle tous. Le féminisme a encore de vastes territoires à conquérir. Un accent particulier est mis dans le film sur l'angoisse du qu'en dira-t-on obsessionnel et fantasmé.
Un autre film (342 Noces de Stephan Streker) labourait déjà le même terrain, celui de l'obstination à imposer des règles insensées. Streker avait un punch, une efficacité dans la narration qui ne s'impose pas ici, tant le film est subtilement descriptif, avec une attention toute particulière à la position de la caméra qui film sans désemparer la jeune actrice absolument parfaite dans ce premier rôle.

Dans les dernières minutes du film, vous serez sensibles à un regard, celui de la petite sœur, couchée dans la pénombre, qui regarde sa sœur agir et qui nous fait espérer que cette grande sœur sera un modèle pour sa cadette.

497

The Guernesey Literary Society (Le cercle Littéraire de Guernesey) de Mike Newell

Vous pouvez rejoindre ce cercle pour passer un moment à la fois agréable, charmant et qui soulève de sérieuses questions.

Agréable parce que les anglais excellent dans la reconstitution de cette époque, celle de l'immédiat après-guerre : musique, costumes, (ne ratez pas les chapeaux !) coiffures, accessoires et décors en tous genres. Charmant parce que les personnages sont admirablement campés, les scènes très joliment écrites, les enchaînements du récit bien huilés et les flash back explicatifs pas trop indigestes.

Mais ce que le film laissera sans doute dans nos mémoires, c'est cette réflexion combien difficile et douloureuse sur ces amours entre occupants et occupés, avec leurs conséquences poignantes et refoulées généralement. Ici, toute la démarche de l’héroïne du film, auteure, est de faire émerger ces drames et essayer de les dépasser.

Le réalisateur Mike Newell est un vieux briscard qui a tout fait, e.a. 4 mariages et 1 enterrement ! Cette maîtrise de la mise en scène, des belles images, contribue au plaisir du spectateur, surtout s'il n'est pas à la recherche d'une cinématographie novatrice et audacieuse.

Le film est adapté du roman épistolaire "Le Cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates", rien que ce titre amuse déjà.
Le directeur de la photo est un des poids lourd du cinéma anglais : Zac Nicholson, à qui l'on doit e.a. les images de La Mort de Staline, et Le discours d'un Roi. Bref, tout est haut de gamme dans ce film qui est plus qu'un divertissement et laisse une impression très agréable et pas du tout racoleuse.



484

The Death of Stalin de Armando Iannucci

Un film qui ressuscite une époque et surtout une forme d'humour rare et très appréciée. Nous sommes immergés à la fois dans un style d'une rigidité, d'une cruauté, d'un cynisme parfaits et dans une ambiance à la Marx Brother, Monty Python, avec un peu du Dictateur de Chaplin en ceci que le sujet traité - certes d'une drôle de manière - est historique.

Il faut accepter les outrances de la caricature, les excès du jeu des acteurs, cette mise en image pour " montrer " qui ajoute à la sévérité bien de l'époque, dans des décors absolument incroyables d'une Babylone de rêve, hymne architectural à la mégalomanie et au mauvais goût. Mais que l'on ne s'y trompe pas : beaucoup de ces décors sont londoniens...

Il y a des " petites " histoires qui disent sur la " grande " histoire tellement plus que Isaac Deutscher ou J'ai choisi la liberté de Victor Kravchenko qui ont été parmi les premiers à nous déciller le regard sur la réalité du vainqueur de Leningrad. Avant L'Aveu et autres ouvrages sur le goulag d'Alexandre Soljenitsyne e.a.

Un tel film devrait être vu par toute la jeunesse ambitieuse qui aspire aux pouvoirs, quels qu'ils soient. Le ridicule ne tue plus, heureusement peut-être : il n'y aurait plus de dirigeants sur cette planète. Mais le film si caricatural soit-il, ne plonge jamais dans le poujadisme du " Tous pourris, tous corrompus ". Allez le voir en rêvant que dans la salle se trouvent réunis tous les dictateurs encore en exercice, même, surtout peut-être, ceux qui ont été élus...

Et étrangement, dans ce qui est donné comme informations sur les producteurs anglais et français, même chez Cinenews.be, nulle mention de la participation glorieuse d'un producteur belge qui n'est pas même mentionnée ! C'est le comble du détournement de fonds publics du Tax Shelter : être relégué dans le bas du générique, et puis oublié dans la communication ; c'est comme par une " purge " en union soviétique.


485

Mektoub My Love : Canto Uno de Abdellatif Kechiche

Rappelons d'abord que ce réalisateur, très souvent primé, est issu du théâtre et encensé par une fraction non négligeable de cinéphiles et de critiques. Son film La Graine et le Mulet m'a laissé le souvenir d'une rare réussite. Puis vint La Vie d'Adèle, film adulé que j'ai trouvé infâme, malgré ses qualités esthétiques et narratives.

Ce film-ci, c'est " bas les masques ", une nullité incomparable, répétitive, ennuyeuse et sans histoire.

La scène de début du film n'est qu'une banale séquence de porno chic : un couple prend son pied avec ardeur sous le regard d'un jeune homme (rôle central) qui " matte " à l'insu de ces joyeux amants. C'est filmé avec tous les codes de la pornographie, le corps de la femme étant montré comme de la viande. Bon appétit messieurs.

MEKTOUB veut dire " destin " et toute cette jeunesse réunie sous les yeux des parents, cherche une réponse à leur sensualité, à leurs questionnements infantiles sur leur avenir. Quelques jeunes actrices retiennent l'attention par leur beauté et leur jeu délié et naturel.

Il y a une prétention scénaristique incompréhensible à situer l'histoire dans les années 90 du siècle dernier. Ce qui est intenable, car les acteurs et actrices, très libres de leurs répliques, utilisent un langage actuel qui fait complétement oublier ce postulat dépourvu d'ailleurs de sens.
Tout le blabla intellectualisant sur cette séquence du début, pleine de sous entendus, qui donnerait le cadre de l'histoire et autres élucubrations, n'est que de la poudre aux yeux. Après cela, comme trois heures nous attendent, l'on s'apprête à contempler des copulations à un rythme soutenu comme dans La Vie d'Adèle. En fait de sexe, l'on ne verra plus que celui d'une brebis qui agnèle. Tout le reste du film est d'un ennui répétitif et incommensurable. Les séquences alternent entre soirées en boites de nuits et sorties plage, permettant au cadreur - un véritable forçat - de filmer des petits culs moulés dans des shorts trop shorts et des mini bikinis laissant voir l'arrondi du bas des fesses.

Un film mystificateur, dégoulinant d'ennui et qui commence de façon très troublante par une exergue aussi fumeuse que le film, évoquant La lumière de la Bible et les Lumières du Coran. Rien n'est plus obscure. Et inquiétant...


486

Finding Your Feet de Richard Loncraine

Vous prendrez votre pied à la vision de ce film " Very British ", fait d'humour et de tendresse, d'un soupçon de cynisme et de beaucoup d'originalité.

D'abord par la " tranche d'âge " des protagonistes, tous à l'aube de leur troisième âge, avec les blessures, les cicatrices, les déceptions qui sont le lot commun. C'est à l'une de ces mères et grand mères que l'on s'intéresse en particulier. Elle quitte sa famille pour rejoindre sa sœur. Cela est extravagant, un saut culturel, une confrontation de deux univers si proches et cependant tellement différents.

La distribution des rôles est - comme le cinéma anglais nous le laisse espérer - absolument parfaite. On retrouve Timothy Spall qui était sensationnel dans The Party (n° 447). Imelda Staunton est parfaite dans le choc des civilisations. Le réalisateur est un vieux renard du cinématographe et il a un sens du rythme, de la durée des plans, des séquences, qui fait de cette comédie une pure merveille, une véritable marqueterie dans laquelle chaque petit morceau brille avec éclat. Les costumes, les décors et l'accessoirisation sont des exemples parfaits de ce qui peut donner à ce genre de film une " vérité " si rare à recréer et qui caractérise, à mes yeux, le " bon " cinéma, ce que les productions françaises, généralement, n'arrivent pas à faire, laissant des stylistes, des décorateurs de catalogue Ikea, gâcher l'ambiance. Ici, c'est la vie même qui est filmée à un moment où il est admis qu'elle passe doucement à l'ombre, alors même que le soleil du désir de bonheur reprend ses droits. Ne ratez pas cette " piece of cake " même s'il est de bon ton dans la critique pédante de prendre ce genre avec des pincettes.


487

Razzia de Nabil Ayouch

Voilà un film très attachant, ambitieux et exigent pour le spectateur, car il faut bien l'admettre, il n'est pas sans grande maladresses dans sa construction, sa structure.

Donner à voir une transformation sociale, profonde et complexe, sur la durée, en intégrant la ruralité et l'urbanité, des antagonistes irréductibles qui ne s'expriment que par les méandres issus d'une ancienne tradition, dans laquelle la population juive a encore une place, une culture riche et parfois refoulée, ce n'est pas simple.

Mais l'on ressent bien les enjeux, le poids de ce qui est montré de façon impressionniste. Et impressionnante. Peu importe de quel pays l'on parle, ce sont tous les pays en mutation de civilisation qui sont ici concernés : l'usage d'une langue minoritaire et la langue prétendument commune ainsi que la langue étrangère dominante, la condition de la femme, l'enseignement, l'homosexualité, sont e.a. les sujets abordés, qui s'entremêlent dans la durée et l'espace, qui percolent dans notre attention durant tout le film comme sans doute dans la vie de ces gens qui nous sont montrés souvent de façon allusives, en clair-obscure.

Tourné à Casablanca par le réalisateur de Much Loved (n° 160) et de  Les Chevaux de Dieu (n° 2) ce film doit être défendu. Et la lecture d'un des commentaires qu'il provoque sur internet, le café du commerce du plus bas étage qui soit, me semble exemplaire de cette nécessité : Encore ce fils de pute de juif qui travaille jour et nuit pour détruire le Maroc en y normalisant la débauche et l'occidentalisation. Il mérite d'être pendu ce fils de pute. Qu'Allah le maudisse.
L'on a beau être partisan de la liberté d'expression, on ne peut tolérer qu'en une seule phrase soient réunis le sexisme, l'antisémitisme, le nationalisme, le refus de l'altérité, la menace de mort, l'appel au crime et l'instrumentalisation du divin.
C'est en effet tout cela que le film analyse, scrute, éclaire de mille façons et contribue à combattre. Et c'est pourquoi il faut le défendre.

Maryam Touzani est d'une beauté exceptionnelle, et elle le doit me semble-t-il, surtout à ce qui l'habite, le combat pour l’émancipation de la femme au pays de la régression et de la burka.

L'importance du film, son charme, compensent largement ce qu'une critique formelle pourrait amener de dévalorisant.

Et je n'oublie pas que la Belgique est en coproduction, avec l'aide du Tax Shelter. Et il faut bien accepter ici ce type de soutien à un cinéma qui n'existerait sans doute pas sans ce soutien militant. C'est autre chose que de soutenir une médiocre comédie franchouillarde.

488

Monsieur Je-sais-tout de François Prévôt-Leygonie & Stephan Archinard

Sur un sujet dont on ne sait rien, ou si peu : le syndrome d'Asperger. Un film très sympa, linéaire, simple mais qui permet au spectateur de s'initier à ces drames restés encore peu connu " du grand public ". Nous sommes avec ce cas, à la limite si difficile à tracer de la différence et du handicap.

Voilà un moyen simple de se plonger dans cette problématique. En bonne compagnie.

Si le casting est classiquement bon, l'enfant est exceptionnel ; un regard que l'on ne captera qu'une seule fois dans la caméra, mais quel regard ! Celui de Max Baissette de Malglaive qui n'en est pas à son premier film malgré son jeune âge et en dépit d'une leucémie qu'il a surmontée très jeune encore. Arnaud Ducret a un abattage un peu caricatural, mais le personnage est cohérent. Alice David est exquise en jeune médecin irrésistible de charme ; et d'autorité compétente. Bigre, ça va cogner. La grand-mère de Monsieur Je Sais Tout est aussi un peu caricaturale, mais pleine de tendresse. Comme le couple des domestiques.

Voilà, on se laisse aller à suivre cette histoire un peu tirée par les cheveux, peu vraisemblable, mais qui est une leçon de vie.

La mise en œuvre, classique, fait un usage, au début, excessif de prises de vue avec drone. Et pour le reste, des solutions " simples et pas chers " permettent de faire du minutage.

La décoration des trois intérieurs principaux est exemplaire d'un stylisme de pure convenance, totalement déshumanisé comme trop souvent le cinéma français s'en contente hélas. Regardez attentivement, vers la fin, l'intérieur de la cuisine de la femme médecin. Aussi irréaliste que ridicule.

Mais le film reste plaisant et touchant.


489

Todos lo saben (Everybody knows) de Asghar Farhadi

Film dont je ne savais rien et dont je suis sorti impressionné. Il s'agit d'un suspens psychologique intra-familiale.

Tout est magnifiquement mis en œuvre : les acteurs et actrices (superbes), les enfants, les décors et la lumière, à l'extérieur de façon grandiose, en intérieur de façon étriquée (c'est un symbole !), la manière dont sont mises en scène les actions en groupe, très réussies, dans lesquelles chaque figurant, chaque mouvement est juste, la profondeur de champs utilisée à bon escient. Des plans de drone pour une fois bien intégrés au récit. Le film est construit en deux parties, la première un peu répétitive et longuette. Mais qui donne à voir la fiesta à l'espagnole dans un village. Puis le drame et la tension qui ne baisse jamais, l'intrigue qui se complexifie jusqu'à l'illisibilité. Mais qui rebondit chaque fois et nous mène au dénouement.

Un divertissement de grande qualité. Réalisé par un metteur en scène iranien qui ne comprend pas un mot d'espagnole...

Le Passé, comme The Salesman (n° 311) avait déjà impressionné par ces réflexions sur les secrets de famille délétères et enfouis sans pouvoir être oubliés. Car finalement l'on constate que " tout le monde le sait ".


































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